dimanche 17 avril 2011

Les antiseptiques

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Les antiseptiques
De tous temps, la lutte contre les maladies infectieuses a tenu une place importante. Bien avant que le mot antiseptique ne soit employé, de nombreuses substances sont utilisées pour éviter le risque de contamination.
Dans la mythologie de l’antiquité gréco-latine, ASCLEPIOS ou ESCULAPE, dieu de la médecine, avaient deux filles : HYGIE et PANACEE.
HYGIE protégeait la santé. Elle est entrée dans la langue française au XVIème siècle avec le mot « hygiène ».
PANACEE rétablissait la santé à l’aide de médicaments. Au moyen-âge PANACEE est devenue nom commun signifiant remède universel à tous les maux.
Dès l’antiquité, de nombreuses substances : (épices, essences, huiles végétales), étaient utilisées pour empêcher la putréfaction des plaies et l’infection des blessures. Intuitivement l’origine environnementale de certaines maladies était reconnue. Certaines précautions étaient donc prises : eau bouillie, fumigations des salles d’opération.
Ainsi, au cours du temps, les traitements empiriques intuitifs et parfois surnaturels ont évolués pour atteindre des bases scientifiques à la fin du XIVème siècle.
Mais, c’est en fait au XVIIIème siècle que le mot antiseptique fut employé par PRINGLE. Ce médecin militaire écossais, classa un grand nombre de substances appliquées sur la peau et les plaies (camphre, acides…). C’est également à cette période que furent découvertes les principales molécules encore utilisées actuellement.

ØEn 1774 : SCHEELE (1749-1786) chimiste suédois découvrit le chlore.
ØEn 1789 : BERTHOLLET (1748-1822) chimiste français, découvrit les hypochlorites. Il les développa dans le petit village de JAVEL, aujourd’hui quai de JAVEL dans le 15ème arrondissement de PARIS. Ceci explique la dénomination d’un produit chloré : eau de JAVEL.
ØEn 1811 : BERNARD COURTOIS (1777-1838) chimiste français isola l’iode à partir de cendres de plantes marines.
ØEn 1929 : LUGOL, médecin français, utilisa ce produit dans le traitement des maladies scrofuleuses (adénopathies cervicales chroniques). La teinture d’iode a été utilisée en 1839 contre la goutte, l’anthrax, le panaris, puis largement employée pour traiter les blessures de guerre.
ØLes fondements scientifiques de l’antisepsie et de la désinfection reposent sur les découvertes de PASTEUR. La théorie des micro-organismes responsables d’un certain nombre de maladies infectieuses marqua la rupture avec les pratiques antérieures. La microbiologie, nouvelle discipline concourut à rendre plus performantes les mesures et pratiques d’hygiène.
ØA partir de 1970, l’élaboration par l’AFNOR. (association française de normalisation) de protocoles normalisés d’étude a permis une meilleure connaissance des propriétés antimicrobiennes des antiseptiques et désinfectants. A la même période, la pharmacopée française introduit en Juillet 1985 une note propharmacopée sur les préparations antiseptiques. La monographie en vigueur actuellement date de 1990.
ØUn comité européen de normalisation CEN TC 216 « antiseptiques et désinfectants » a été créé dans le but d’harmoniser les normes dans les différents pays européens.


DEFINITIONS
ETHYMOLOGIE
Le mot ANTISEPTIQUE (du grec "anti" : contre et "septikos" dérivé de "sepein" : corrompre) a été utilisé pour la première fois par PRINGLE en 1750 pour qualifier une substance capable de prévenir la détérioration de la matière organique.
Au milieu du XIXè siècle, il s’applique à des produits capables de détruire les microbes pathogènes.

ANTISEPSIE
"Opération au résultat momentané permettant au niveau des tissus vivants, dans la limite de leur tolérance, d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus, en fonction des objectifs fixés.
Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes et/ou virus présents au moment de l’opération" (AFNOR Mars 1981 NF T 72-101).

ANTISEPTIQUE
« Produit ou procédé utilisé pour l’antisepsie dans des conditions définies.
Si le produit ou le procédé est sélectif, ceci doit être précisé. Ainsi un antiseptique ayant une action limitée aux champignons est désignée par : antiseptique à action fongicide" (AFNOR Mars 1981 NF T 72-101).
La Xe édition de la Pharmacopée française (Janvier 1990) apporte quelques éléments supplémentaires à cette définition :
Les antiseptiques sont "des préparations ayant la propriété d’éliminer ou de tuer les microorganismes ou d’inactiver les virus sur des tissus vivants (peau saine, muqueuses, plaies). Elles sont présentées dans leur forme d’utilisation et sont utilisées telles quelles sauf exception justifiée et autorisée ».
Elles présentent une activité antibactérienne, antifongique, antivirale.
La destination d’emploi des préparations antiseptiques est précisée : peau saine, muqueuses, plaies, ainsi que la durée d’application nécessaire à l’obtention de l’activité.
En fonction de l’indication, l’inactivation par d’éventuelles "substances interférentes" ainsi que les incompatibilités sont indiquées.
Elles n’altérent pas les tissus sur lesquels elles sont placées (tolérance)."

ASEPSIE
"Ensemble des mesures propres à empêcher tout apport exogène de micro-organismes ou de virus" (AFNOR Mars 1981 NF T 72-101).

• DESINFECTION
"Opération au résultat momentané permettant d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus indésirables portés par des milieux inertes contaminés, en fonction des objectifs fixés.
Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes et/ou virus présents au moment de l’opération" (AFNOR Mars 1981 NF T 72-101).

DESINFECTANT
"Produit ou procédé utilisé pour la désinfection ou la décontamination dans des conditions définies" (AFNOR Mars 1981 NF T 72-101).

REMARQUES ET RAPPELS
Tout tissu vivant doit être propre avant d’être « aseptisé » ; toute surface inerte doit être propre avant d’être désinfectée.
La décontamination, le nettoyage doivent avoir lieu avant la désinfection.
Selon le Comité Européen de Normalisation, le terme d’antisepsie devrait être réservé au cas où l’opération est destiné au traitement d’une infection constituée, le terme de désinfection désignant une opération visant à prévenir une infection. On parle ainsi de désinfection de la peau saine, de désinfection des mains, mais d’antisepsie d’une plaie.
En ce qui concerne le lavage et la désinfection des mains, la normalisation européenne utilise le terme "hygiénique" à la place du terme "antiseptique". On parle ainsi de lavage hygiénique des mains lorsqu’on utilise un savon antiseptique, et de friction hygiénique lorsqu’on utilise une solution hydro-alcoolique pour la désinfection des mains sans rinçage.
MODE D’ACTION DES ANTISEPTIQUES ET DES DESINFECTANTS
•Les antiseptiques et désinfectants sont capables d’inhiber la croissance des micro-organismes (bactériostase, fongistase, virustase), ou d’avoir une action létale (bactéricidie, fongicidie, virucidie, sporicidie). Certains antiseptiques et désinfectants présentent ces deux modes d’action en fonction des doses. D’autres ont toujours une action létale ou toujours une action bactériostatique ou fongistatique quelle que soit la concentration utilisée.
•La rémanence désigne l’effet anti-microbien de l’antiseptique persistant sur la peau (ou du désinfectant persistant sur une surface).
•Le mécanisme d’action des produits varie d’une famille d’antiseptiques à l’autre : coagulation des organites intracellulaires, altération de la membrane,…
•Selon leur nature et leur concentration, les antiseptiques et désinfectants ont une ou plusieurs cibles à l’intérieur de la cellule. Ils doivent donc traverser la paroi cellulaire pour exercer leur action.

RESISTANCE BACTERIENNE AUX ANTISEPTIQUES ET DESINFECTANTS
L’élément majeur de la résistance est la paroi de la cellule bactérienne. En effet, la majorité des antiseptiques et désinfectants exercent leur action essentiellement au niveau de la membrane cytoplasmique et doivent donc traverser la paroi. Chez les souches devenues résistantes, ces mécanismes de passage sont altérés.
Ainsi, les mycobactéries, dont la membrane externe est très épaisse, sont plus résistantes que les bactéries à Gram négatif, elles-mêmes plus résistantes que les bactéries à Gram positif .
NB : Le phénomène inverse intervient pour les virus : les virus enveloppés (ex : VIH) sont plus sensibles que les virus nus (ex : Poliovirus) car l’enveloppe externe riche en lipides est facilement désorganisée par les antiseptiques et désinfectants, ce qui provoque l’inactivation du virus.
1. La résistance naturelle ou intrinsèque
La résistance naturelle est un caractère inné, stable, de l’espèce ou de la souche bactérienne. Elle détermine le spectre d’activité des antiseptiques et des désinfectants
2. La résistance acquise
La fréquence des résistances acquises aux antiseptiques et désinfectants est nettement inférieure à la fréquence des résistances acquises aux antibiotiques.
2.1. Résistance acquise chromosomique
La résistance chromosomique peut être obtenue expérimentalement en faisant cultiver certaines espèces bactériennes (bacilles à Gram négatif : Serratia marcescens, Providencia stuartii, Klebsiella pneumoniae, Pseudomonas aeruginosa) en présence de concentrations sublétales de produit (chlorhexidine, ammoniums quaternaires, peroxyde d’hydrogène, formol, polyvinylpyrrolidone iodée ou PVPI).
2.2. Résistance acquise extrachromosomique
Le caractère de résistance à un ou plusieurs antibactériens est porté par un plasmide, petit fragment d’ADN indépendant du chromosome, transmissible d’une bactérie à l’autre et héréditaire.
Quelques gènes de résistance aux antiseptiques sont connus :
- gène qac (quaternary ammonium compound) code pour la résistance aux ammoniums quaternaires. Cette résistance peut être associée à une résistance à la chlorhexidine.
- gène mer, code pour la résistance aux dérivés mercuriels. Il s’agit d’une résistance très fréquente.
Dans la pratique, le problème se pose lorsque les bactéries sont résistantes à des concentrations proches ou supérieures de la concentration d’emploi. Une diminution de la concentration du produit peut entraîner l’émergence d’une résistance des bactéries. Les circonstances de réduction de l’activité des antiseptiques et désinfectants sont nombreuses : matières organiques, substances interférentes, vieillissement du produit…
Il est donc essentiel de respecter scrupuleusement les conditions d’utilisation des produits (concentrations et mode d’emploi) afin d’éviter l’émerge


HALOGENES
PRODUITS CHLORES
Depuis plus de deux siècles, les produits chlorés sont utilisés en milieu industriel et médical pour leurs propriétés blanchissantes, désodorisantes et désinfectantes.
1. Principaux produits et présentation
Jusqu’à un titre de 5 degrés chlorométriques, les produits chlorés peuvent être utilisés comme antiseptiques de la peau saine, des muqueuses, et pour l’irrigation des plaies. A des titres supérieurs, ils sont irritants pour la peau et sont utilisés comme désinfectants (ex : eau de Javel).
Le degré chlorométrique de Gay-Lussac correspond au nombre de litres de chlore gazeux qu’un litre de solution ou d’extrait est capable de dégager en présence d’un acide dans des conditions normales de température et de pression. Un degré chlorométrique équivaut à 3,17 g de chlore actif par litre.
solution neutre diluée d’hypochlorite de sodium ou soluté de Dakin (Pharmacopée française Xème éd)*
C’est une préparation officinale ou hospitalière dont le délai de péremption est court : 2 à 3 semaines maximum.
• Dakin Cooper stabilisé® (AMM) : flacons de 250 ml, 500 ml ou 1 litre, monodose de 60 ml.
Il s’agit d’une spécialité pharmaceutique dont le pH, le système tampon et le conditionnement permettent d’allonger le délai de péremption à 30 mois. La durée de conservation du flacon une fois ouvert ne doit pas excéder 15 jours. Le titre en chlore actif est identique a celui du soluté de Dakin
*Le soluté de Dakin titre 5 g/l (0,5%) soit 5000 ppm (partie pour million) en chlore actif ou 1,5 degré chlorométrique.
• Amukine® (AMM) : flacon de 125 ou 250 ml
Le délai de péremption de cette spécialité pharmaceutique est de 36 mois (flacons non ouverts) et 15 jours maximum après ouverture.
Ce médicament titre 0,6 g/l (0,06%) soit 600 ppm en chlore actif ou 0,2 degré chlorométrique.

- Spectre d’activité
Les dérivés chlorés ont un spectre d’activité étendu : bactéries (formes végétatives et sporulées), champignons, virus, spores.
- Mode d’action
Le délai d’action est rapide, dès la première minute de contact. Le pouvoir oxydant provoque la destruction de protéines au niveau membranaire et chromosomique

Facteurs influençant l’activité et la stabilité
pH :
- à pH < 5, il y a dégagement de chlore gazeux : la solution perd son activité.
- à pH = 5, l’activité est maximale.
Température : si elle est augmenté, la stabilité des solutions diminue mais l’action antimicrobienne est plus rapide à 37°C qu’à 22°C.
Les matières organiques, les savons, réduisent le pouvoir antimicrobien.
Les minéraux : fer, cobalt, nickel, cuivre et manganèse diminuent la stabilité des solutions d’hypochlorites.
Les rayons ultraviolets accélèrent la dégradation des produits chlorés
Indications
Antisepsie de la peau saine et des muqueuses.
Précautions d’emploi
- Nettoyer et rincer soigneusement la peau avant application en raison de la forte inhibition par les matières organiques et les savons. Cette étape de nettoyage préalable est d’autant plus importante pour les produits faiblement dosés en chlore actif.
- Risque de sensation de brûlure sur peau lésée (plaies importantes)
- Utiliser de l’eau déminéralisée, bactériologiquement propre pour la préparation de solutions stables (cf effet des minéraux).
- Conserver les solutions dans les récipients d’origine qui doivent être fermés et gardés à l’abri de la lumière et de la chaleur.
- En cas d’ingestion, l’antidote est le bicarbonate de sodium.
- Tenir compte des courts délais de péremption du Dakin officinal.

PRODUITS IODES
Découvert en 1950, les produits iodophores, moins irritants et allergisants que l’iode, sont actuellement largement utilisés.

Principaux produits et présentations
ØL’iode et ses dérivés:
- Les solutions alcooliques d’iode :
Alcool iodé à 1%
Teinture d’iode à 5%
Présentation : Préparation hospitalière, conservation en flacon de verre teinté.
- Les solutions aqueuses d’iode :
Solution de Lugol à 1%
Solution de Tarnier à 0,15%
Ces solutions sont très peu utilisées ; cependant restent employées pour certaines colorations en laboratoire.

ØLes iodophores:
Bétadine® dermique 1 % en iode libre ou 10% PVPI
flacons jaunes de: 10 ml, 125 ml, 500 ml.
Indications : Antisepsie de la peau et des muqueuses saines ou lésées.
Bétadine® solution dermique alcoolique 5%
Flacons de 10 ml/125 ml. Indications : antisepsie de la peau saine avant acte de petite chirurgie
Bétadine® gargarisme, bain de bouche 10% PVPI
flacons verts de 125 ml .
Indications : Traitement local d’appoint des infections limitées à la muqueuse de la cavité buccale et de l’oropharynx et en soins postopératoires en stomatologie. Traitement adjuvant des surinfections des néoplasies du carrefour aérodigestif .

-Spectre d’activité
Les produits iodés sont bactéricides, virucides, fongicides, et sporicides.
- Mode d’action
L’iode sous forme moléculaire est capable de traverser rapidement la membrane cellulaire. Son action est due à son pouvoir oxydant comme les autres halogénés sur les protéines enzymatiques et membranaires .

Facteurs influençant l’activité:
Ø pH
Les produits iodés sont stables entre pH 1 et pH 6.
Les iodophores sont instables à pH alcalin.
ØSubstances interférentes
Les matières organiques (protéines, sérum, sang…) diminuent l’activité des dérivés iodés.
ØDélai d’action
In vitro : 5 minutes (normes AFNOR)
En pratique:
Le temps de contact requis est d’une minute exemple : Bétadine
L’action se manifeste dès 30 secondes, mais il est recommandé d’attendre un temps de contact d’1 minute minimum afin d’obtenir une activité bactéricide
Indications
- Détersion,
- Antisepsie de la peau saine et lésée,
- Antisepsie des muqueuses buccales, oculaires et génitales.
- Antisepsie du champ opératoire,
- Traitement d’appoint des affections dermatologiques primitivement bactériennes ou susceptibles de se surinfecter.

Contre-Indications
- Intolérance à l’iode (risque de dermites allergiques),
- Grossesse au cours des 2e et 3e trimestres,
- Allaitement : risque de dysfonctionnement thyroïdien,
- Nouveau-né de 0 à 1 mois et prématuré (cause de maturation thyroïdienne),
Proscrire l’emploi simultané avec des dérivés mercuriels et avec les organo-mercuriels
( risque de formation de composés caustiques ).

Précautions d’emploi
- Antécédents de problème thyroïdien,
- Précautions recommandées lors d’exploration thyroïdienne,
- Précautions d’emploi chez l’enfant de1 mois jusqu’à 30 mois:
si l’utilisation s’avère indispensable, elle se limitera à une application brève et peu étendue et sera suivie d’un lavage à l’eau stérile,
- Précautions d’emploi chez les sujets brûlés : >à 10% de la surface corporelle brûlée (la surcharge en iode peut entraîner un dysfonctionnement de la thyroïde),
- Instabilité à la chaleur et à la lumière,
-Corrosif avec des métaux.
Recommandation
En cas d’ingestion, diriger vers un centre anti-poison .


BIGUANIDES
Les biguanides sont utilisés généralement sous forme de digluconate ou de diacetate de
Chlorhexidine.
C’est de loin l’agent anti-plaque le plus utilisé et celui dont l’efficacité semble largement démontré par les nombreuses études réalisées : des essais à long terme sur 1200 sujets ont montré une réduction de plaque de l’ordre de 55% et pour la gingivite 45% (Gorssman et coll 1986).


ØIl s’agit du digluconate de Chx d’abord incorporé dans les bains de bouche à une concentration de 0.2%, celle-ci a été rapportée à 0.12% montrant les mêmes propriétés thérapeutiques.
Spectre d’activité
ØLa Chx est un agent antimicrobien à large spectre, actif sur un grand nombre de bactéries à G+ et G- des plaques supra et sous gingivales ainsi que sur les levures (Stanley et coll 1989).
Mécanisme d’action:
ØLe mécanisme d’action de la Chx est lié à une réduction de la formation de la pellicule, une altération de l’adsorption bactérienne et/ou de l’adhérence aux dents, ainsi qu’une altération de la paroi bactérienne entraînant la lyse. Un autre aspect intéressant de ce produit concerne sa capacité de rétention sur les surfaces buccales qui concerne environ 30% de la quantité de produit introduit en bouche. De cette façon l’efficacité bactériostatique peut être maintenue plusieurs heures après son passage en bouche.

Facteurs influençant l’activité
L’activité de la Chx peut être réduite avec le contact avec le sang, le pus ainsi que par certains anions. De même elle présente une incompatibilité clinique avec les excipients d’un dentifrice : elle précipite en présence de molécules comme le stéarate, le lauryl sulfate et devient inactive (Johansen et coll 1975 Sjoblom 1976). Donc pour optimiser son effet, le bain de bouche, s’il est effectué après le brossage, doit être précédé d’un rinçage énergique à l’eau (Ciancio 1987).
Indications et utilisations:
-Du fait de ses propriétés, l’utilisation de la Chx s’est orientée vers une administration sous forme de bain de bouche, voire d’irrigation sous gingivale en complément du traitement mécanique d’élimination de la plaque. Un tel traitement complémentaire peut s’envisager soit au moment de la thérapeutique étiologique, soit après un traitement chirurgical soit enfin en parallèle aux soins parodontaux de soutien (Tenenbaum).
-Elle sera également prescrite :
· Lorsqu’il est impossible d’avoir recours à l’élimination mécanique après chirurgie ou pour contrôler la bactériémie chez des patients à risque d’endocardites
· Pour les patients sous ciclosporine après transplantation, ceux sous chimiothérapie, pour les personnes handicapées ou en institution.
· Enfin lorsque son action antifongique est recherchée
La Chx présentent des effets secondaires bien connus et réversibles à l’arrêt du traitement (coloration noirâtre des dents, de la langue et de certaines obturations ; perte ou modification du goût) apparaissant après 10 à 15 jours de traitement.
Contre-Indication
•La chlorhexidine ne doit pas être mise en contact avec l’oreille interne (risque de surdité neuro-sensorielle), le cerveau et les méninges.
Précautions d’emploi :
- Eviter les badigeons étendus et les bains prolongés et concentrés.
- Limiter l’utilisation pour les prématurés et les nourrissons.
- La chlorhexidine est irritante pour les muqueuses, si la concentration est supérieure à 0,02%.

ALCOOLS
Principal produit et présentations
Alcool éthylique de 60 à 70° :
Flacons de contenance variée
Compresses imprégnées en sachet.
L’alcool est dénaturé par l’adjonction de colorants, de camphre ou d’autres alcools. En France, seul l’alcool éthylique est utilisé à usage antiseptique.
Le propanol-2 ou isopropanol entre dans la composition d’autres antiseptiques (exemple
d’utilisation : solution hydro-alcoolique pour antisepsie des mains).
Il est utilisé comme solvant avec d’autres antiseptiques qu’il potentialise (exemples : alcool iodé, hexamidine, chlorhexidine)


Spectre d’activité
- Bactéricide et actif sur Mycobacterium tuberculosis
- Faiblement fongicide
- Virucide de façon variable.
- Non sporicide
Facteurs influençants l’activité
Son hydratation facilite la pénétration dans les cellules bactériennes.
Son efficacité est réduite en présence de matières organiques. Il coagule les protéines.
Délai d’action : 2 minutes à condition que la peau soit maintenue humide.
Durée d’action : activité antimicrobienne brève car l’alcool est très volatil.

Indications
Alcool de 60 à 70°: antisepsie de la peau saine, des sites d’injections et des prélèvements sanguins (sauf : hémoculture, cathétérisme, ponction artérielle et les actes nécessitant une asepsie chirurgicale).
Contre-indications
- Ne pas appliquer sur les muqueuses et les plaies.
- Ne pas employer comme antiseptique pour dosage de l’alcoolémie.
- Ne pas utiliser sur des surfaces cutanées étendues des nourrissons de moins de 30 mois, en raison des risques d’intoxication alcoolique*.
Précautions d’emploi :
- Incompatibilité avec les savons
- Très inflammable et volatil (Extrait de l’arrêté du 23 Mai 1989 : le stock des liquides inflammables est limité à 3 litres dans
les services ou unités de soins).
N.B : Les alcools éthyliques à 60° et 70° peuvent être utilisés pour la désinfection des sites de prélèvements ou d’injections sur les tubulures.

AMMONIUMS QUATERNAIRES
- Le chlorhydrate de cetylpyridinium est le principal agent anti-plaque de ce groupe. Une étude à 6 mois (Lobene et coll 1977) a montré des diminutions de14% de la plaque et de 14% des gingivites.  Toutefois la basse substantivité de ce produit ainsi que son interaction avec de nombreuses substances anioniques (abrasifs et particules chargées se trouvant dans les dentifrices ) contraint le patient à l’utiliser au moins quatre fois par jour et après un soigneux rinçage à l’eau après brossage ce qui peut être à l’origine de problèmes d’observances.
Spectre d’activité :
- Bactéricide ou Bactériostatique (sur les G + ) selon les concentrations,
- Fongistatique,
- Aucune action sporicide,
- Inactif sur les mycobactéries,
- Activité faible sur les virus enveloppés, activité nulle sur les virus nus.
Facteurs influençant l’activité :
Leur efficacité est réduite en présence de matières organiques, de substances anioniques (savons), d’eau dure, de composés non ioniques (polysorbates ).

Indications :
Traitement d’appoint des affections dermatologiques
Antisepsie et nettoyage de la peau saine et des muqueuses.
Contre-indications :
-ne pas utiliser chez le nouveau-né, ni le nourrisson
- ne pas utiliser sur peau lésée et muqueuses

Précautions d’emploi :
- ne pas avaler, ils sont hémolytiques et curarisants par voie orale,
- les solutions aqueuses d’Ammoniums Quaternaires se contaminent très facilement. Elles doivent être conservées dans leur flacon d’origine au maximum 8 jours après ouverture.
- ne pas utiliser avec les composés anioniques,
- ils précipitent en présence de solutions iodo-iodurées, iodo-mercurate de potassium, de sels d’or.

OXYDANTS
Eau oxygénée ( peroxyde d’hydrogène)
D’après Charon, l’utilisation de  l’eau oxygénée à 5 volumes est basée sur les arguments suivants :
·       Nos défenses naturelles l’utilisent (Charon et coll 1982)
·       Les bactéries protectrices l’utilisent (Thomas et coll 1984)
·       La PO2 diminue quand la profondeur de la lésion augmente (Mettreaux et coll 1985)
·       Les neutrophiles des malades atteints de parodontites sévères produisent des quantités insuffisantes d’eau oxygénée (Charon et coll 1987)
·       La salive contient une lactoperoxydase qui régule les quantités éventuellement trop importantes d’eau oxygénée.
Spectre d’activité
Le peroxyde d’hydrogène est plus actif sur les bactéries à Gram négatif que sur les bactéries à Gram positif, Il est également actif sur Mycobacterium tuberculosis à des concentrations de 6% à 10% (30volumes),
Son activité sur les mycobactéries atypiques reste mal connue,
A température ambiante, il est lentement sporicide.
Il posséde une activité lente sur les levures et les virus.
Mode d’action
Son mécanisme d’action est mal connu,
Facteurs influençants l’activité
Son activité s’accroît à pH acide,
Son activité est limitée en présence de matières organiques

Indications
L’eau oxygénée peut s’utiliser en bain de bouche, en application locale mélangée à du bicarbonate de soude qui potentialise son action ou en irrigation sous-gingivale. Cependant, l’irrigation d’eau oxygénée à 1% est moins efficace que la Chx à 0.12% pour réduire la quantité de plaque et d’inflammation gingivale (Boyd, 1989).
- Antisepsie des plaies gangrenées ou des délabrements tissulaires nécrotiques(exp:G.U.N.A).
Précautions d’emploi
Le contact avec la peau et les muqueuses des solutions concentrées peut provoquer des irritations ou des brûlures.
Elle est dangereuse pour les yeux par son action sur la muqueuse oculaire.
A forte concentration (30%), le port de gants et de lunettes de protection sont recommandés lors des manipulations.
Les solutions sont à conserver au frais, à l’abri de la lumière dans des flacons remplis au 3/4 et doivent être fermés.
N.B : La tendance actuelle est de moins en moins utiliser ce produit.

La sanguinarine
Extraite de la sève de sanguinaria canadensis et dont le nom chimique est benzophénathradine. Elle existe sous forme de bain de bouche et de dentifrice. Le produit ne serait efficace sur la réduction de plaque et sur l’inflammation quand le dentifrice et  le bain de bouche sont utilisés simultanément (Kopczyk et coll 1991) à une fréquence de quatre fois par jour (Palcanis 1984).

Les sels métalliques
Avec le citrate de zinc (le plus utilisé), l’étain  ou le cuivre. Les sels métalliques ont un potentiel anti-plaque et une activité antimicrobienne. A de très haute concentration ils peuvent être bactéricides. Le citrate de zinc a une activité modérée sur l’inhibition de la plaque en formation mais agit sur la plaque existante. Il a globalement une activité modérée comparée à celle de la CHX. Mais associé à un agent antimicrobien non ionique, le triclosan, ce système anti-plaque présente une bonne efficacité .

L’hexétidine
Elle présente une activité in vitro au mieux égale à celle de la Chx, mais elle ne possède pas sa capacité de rétention sur les surfaces buccales. Son effet anti-plaque est inférieur à celui de la Chx.

Les composés phénolés
*Le triclosan a une activité antimicrobienne à large spectre et des propriétés anti-plaque sans effet secondaire. Il est compatible avec la formulation des bains de bouche et des dentifrices et a une bonne rétention orale après brossage. Le triclosan adsorbe la paroi des bactéries salivaires et de la plaque adhérente et interfère le métabolisme bactérien (Cummins 1991). *La listérineTM : c’est un  bain de bouche phénolé à base d’huiles essentielles de menthol, de thymol, d’eucalyptus et de méthylsalicylate. Elle serait capable d’extraire les lipopolysaccharides dérivés des endotoxines des bactéries à Gram négatif contenues dans la plaque dentaire (Fine et coll. 1985) ce qui lui conférerait une activité anti-plaque.

NOUVELLES DONNEES SUR LES ANTISEPTIQUES
Effet supra-gingival des antiseptiques
La prévention dentaire passe par l’effet mécanique, chimique ou bien la combinaison des deux.
En 25 ans, le matériel de brossage a peu évolué (brosses à dents, brossettes, fils, batonnets…).
En revanche, de nombreux antiseptiques sont actuellement disponibles. Certains sont utilisés depuis longtemps, d’autres sont nouveaux, enfin on en redécouvre certains qui étaient oubliés.
Cinq critères de bases (la spécificité, l’efficacité, la rémanence, la sécurité et la stabilité) vont nous aider à les juger .

La spécificité
L’exemple donné pour définir la spécificité des antiseptiques est celui de la parodontite nécrotique, pour laquelle un antibiotique ne sera prescrit que si le patient présente de la température. Dans le cas contraire, l’utilisation d’un antiseptique approprié sera suffisante.
L’efficacité :
Une solution peut n’avoir aucune efficacité, une efficacité sous clinique (diminution de
l’indice de plaque mais pas d’effet sur la gingivite), ou un effet clinique (diminution des deux paramètres.)

On citera les expériences suivantes et leurs résultats:
Ramberg et coll 1992:l’efficacité d’un bain de bouche sur les différentes faces dentaires.
Ø Faces linguales (+++).
Ø Faces vestibulaires (+).
Ø Faces proximales (-).
Ø Effets sous gingivales nuls.

Molécules testée est la chlorhexidine
[C] PI
[C]=0.2% PI=0
[C]=0.1% GI=0
[C]+M.G GI=0
=0.12%

Brecx et coll (1992)
*La listérine(1) * la chlorhexidine (2)
*fluorure d’amine/étain : le Méridol® (3)
*un placebo(4)
3 semaines:
* PI(4) ≥ PI(1) ,PI(3) ≥ PI(2)
* GI(1) (2) (3) ≥ GI(4)
La vitalité des bactéries est aux environs de 70% après utilisation du placebo ou de la listérine. La chlorhexidine reste la plus efficace. Le fluorure d’amine/étain est efficace plus lentement, et au-delà d’un certain temps son action diminue.
3 mois :même résultats Brecx et coll (1993)
+le nombre de bactéries mortes est le même à long terme entre les produits.

La chlorhexidine 0.06% a été comparée le fluorure d’amine/étain sur une durée de 6 mois.
Pour l’indice de plaque et l’indice gingival, les résultats ne sont pas statistiquement
significatifs entre la chlorhexidine et le fluorure d’amine/étain. Cela prouve donc, que l’on peut aboutir aux mêmes résultats en utilisant deux fois par jour de la chlorhexidine 0.06% ou une seule fois du fluorure d’amine/étain. (Hoffmann et coll. 2001).


La rémanence
C’est le temps d’action d’une substance in situ. Cela consiste à calculer le nombre de nanomolécules par millilitres de salive. Compte tenu des différences de protocole, très peu d’études sont comparables. Ces résultats sont très variables en fonction du type de molécules utilisées (chlorhexidine, triclosan, sanguinarine ). La chlorhexidine est la meilleure. Le
résultat de ces études intervient pour définir la fréquence d’utilisation d’une solution. L’étude de Bonesvoll et coll. 1974, entre autre, a permis de déterminer que la chlorhexidine à 0.2% était plus efficace si on l’utilisait deux fois par jour pendant une minute.


La sécurité
Seule une étude animale a évoqué un risque sur l’utilisation de la chlorhexidine à très forte dose, et sur une période prolongée. Ces résultats n’ont jamais été confirmés. D’un point de vue clinique, deux rapports de cas d’oedème de Quincke ont été publiés. Les effets secondaires locaux de la chlorhexidine à 0.2% peuvent être la desquamation des muqueuses et /ou des
dépôts bruns sur la langue faisant suite à une utilisation prolongée.
Les colorations au niveau des dents peuvent être évaluées par le "discoloration index". Après trois et six mois
d’utilisation, la solution de fluorure d’amine/étain peut donner une coloration brunâtre moins marquée que pour la chlorhexidine (Brecx et coll. 1993). Mais celles-ci peuvent être limitées par un brossage efficace.

La stabilité
Chaque produit a son type de stabilité : par exemple le fluorure d’amine/étain peut perdre une partie de son efficacité suite à un contact prolongé à l’oxygène. La chlorhexidine quant à elle est inactivée par les tanins, les anions, le calcium, le sang, le pus et la chaleur.
On rappelle que pour une parodontite nécrotique chez un patient n’ayant pas de température, la chlorhexidine 0.2% est le traitement de choix. Il en est de même pour les soins post-opératoires. Cependant, il ne faut pas oublier que la chlorhexidine existe également à une concentration de 1% sous forme de gel. Cette forme galénique peut être préconisée suite à un dégagement de canine. Pendant le traitement orthodontique, des solutions de chlorhexidine à 0.06% ou de fluorure d’amine/étain sont une aide précieuse à l’hygiène bucco-dentaire des patients.

Des solutions ou des gels fluorés sont à prescrire chez les patients âgés pour prévenir les caries de collet. Ces gels sont indispensables pour éviter les caries au niveau de la furcation après une tunnelisation.
Les antiseptiques exercent une action sur la prévention primaire et secondaire de la gingivite ou de la parodontite chronique. Pour le traitement de la gingivite, plus on utilise une
concentration élevée de chlorhexidine, plus la plaque dentaire va disparaître, mais cela n’est pas toujours suffisant. Pour le traitement des parodontites nécrotiques, dans une certaine mesure cela fonctionne à condition d’utiliser de la chlorhexidine à 0,2%.

Effet sous-gingival des antiseptiques
•Quel antiseptique peut arrêter la parodontite ?
Le triclosan diminue l’inflammation et donne de faux résultats.
La chlorhexidine pose un gros problème car elle est inactivée par le sang et le pus.
L’iode est efficace contre les bactéries, les spores, les levures, les protozoaires et les virus. Le seuil clinique se situe à 0.05%.
ØElle présente des avantages vis-à-vis d’autres substances : elle est soluble dans l’eau, moins volatile, moins irritante et donne moins de colorations que la chlorhexidine. De récents résultats montrent que sur des poches moyennes à profondes, une seule irrigation avec l’iode 0.05% permet de diminuer durablement le pourcentage de spirochètes et la vitalité des bactéries. Avec de la chlorhexidine, on récupère le niveau de départ à 31 jours, et avec un placebo cette diminution ne dure pas. L’iode est donc plus efficace que la chlorhexidine en sous-gingival à long terme .
L’iode à 0.1% est actuellement testé. Il est plus efficace en sous-gingival qu’en supra-gingival, sur la vitalité des bactéries.

choix de la molécule
Ce qu’il faut retenir au niveau du choix de la molécule :
Øà court terme en supra- gingival : la chlorhexidine
Øà long terme en supra-gingival : le fluorure d’amine/étain
Øet en sous-gingival : l’iode.


Les antiseptiques sont de véritables médicaments.
Si l’utilisation irréfléchie des antibiotiques favorise l’apparition des résistance ;
l’utilisation irréfléchie des antiseptiques favorise le changement de la flore buccale et donc l’apparition des maladies parasitaires.

BIBLIOGRAPHIE
*ANTISEPTIQUES ET DESINFECTANTS (Mai 2000)
Centre de Coordination de la Lutte contre les Infections Nosocomiales de l’Inter région Paris – Nord Institut Biomédical des Cordeliers

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