mardi 5 avril 2011

Banques traditionnelles (tontines) et le phénomène de l'économie informelle

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Afrique : histoire, economie, politique

1998-2001

ECONOMIE INFORMELLE ET TONTINES
La décennie 80 marque le début de la crise économique et la mise du continent africain (en proie a des difficultés sans équivalents) sous administration du F.M.I. et de la Banque Mondiale. Implicite dans les annees70, le secteur informel a pris de l'ampleur au point de concurrencer, à son avantage, le secteur formel. Déjà sous les menottes coloniales, les agents économiques arrivaient a soustraire leur production de l'impôt dit "impôt de capitation", vertement dénonce par les leaders des mouvements de résistance, dont André Gerard Matsoua. Que de temps perdu aujourd'hui a élaborer des plans de sauvetage, a réduire des dettes, alors qu'entre temps les populations doivent vivre ou plutôt survivre : d'ou la floraison et l'ampleur des activités du secteur informel. Quelles sont les causes de cette émergence ? Est-ce un frein ou un facteur de développement ?
TENTATIVE DE DEFINITION :
Il existe plusieurs définitions du concept de secteur informel. Deux nous paraissent pertinentes.
1)- Première définition : le secteur informel est l'ensemble des activités :économiques qui se réalisent en marge de législation pénale, sociale et fiscale ou qui échappent a la Comptabilité Nationale.
2)- Seconde définition : c'est l'ensemble des activités qui échappent a la politique économique et sociale, et donc a toute régulation de l'Etat. Dans tous les cas, les deux définitions se recoupent puisqu'elles soulignent l'idée de fraude. Paradoxalement, ce secteur censé se soustraire au contrôle de l'Etat fonctionne allègrement au vu et au su de tous. Complaisance ? Ambiguïté de l'Etat ? Des trois secteurs connus (primaire, secondaire, tertiaire), dans quelle catégorie classer l'informel dans la mesure ou toutes les activités des trois secteurs y sont représentées ? Banques traditionnelles (tontines), ateliers de réparation, médecine de proximité s'y côtoient. D'ou la gêne qu'éprouvent certains économistes d'appliquer la notion de "secteur" a celui de l'informel.
LES RAISONS DE L'EMERGENCE DU PHENOMENE
Entre les années 50 et 80, l'Afrique s'est distinguée par un boom démographique inversement proportionnel a la croissance économiques. Avec un revenu per capita inférieur a 1000 dollars, ces pays n'ont pas moins franchi le cap de 24% de croissance démographique par an. Preuve s'il en était que pauvreté et forte natalité font bon ménage (le lit du pauvre est fécond). Au cours de la même période, la population urbaine s'élevait au rythme de 6% par an et celle des
villes périphériques de 10% alors que l'accroissement des emplois offerts dans le secteur formel ou secteur moderne ne représentait que 2%. Très vite, la demande d'emplois est apparue supérieure a l'offre. A la trilogie déterminante classique, doit-on ajouter un quatrième secteur qui serait le secteur informel ayant droit de cite au même titre que ses trois rivaux ?
Le développement du chômage urbain, conséquence logique de la crise économique, s'est accompagne de émergence et de l'essor du secteur informel. C'est une question de survie de ces populations refusées par le secteur formel. Le secteur informel joue un rôle d'adoption des migrants et un rôle d'accueil des agents économiques exclus du secteur officiel. C'est une zone tampon entre le secteur traditionnel rural (le monde paysan ou le troc est roi) et le secteur moderne. La fin du troc a chasse la population rurale vers le secteur informel faute d'être captée par la fonction publique. La divisibilité des produits, et leur demande évolutive en raison de la faiblesse de leur pouvoir d'achat, est un facteur qui renforce le couple vendeur/acheteur. Cette relation au-delà de sa fonction économique, favorise une convivialité absente dans le secteur formel ou les prix ne donnent pas lieu a des négociations. La baisse sans cesse croissante du pouvoir des salaries exerçant dans le secteur moderne incite les ménages a rechercher des revenus complémentaires dans le secteur informel pour joindre les deux bouts du mois. L'adoption et la mise en oeuvre des politiques d'ajustement structurel avec ses effets pervers (réduction des salaires, diminution des effectifs de la Fonction publique, privatisation des entreprises d'Etat...) ont contribue a la dévalorisation du secteur public et donc au gonflement du nombre d'agents opérant dans le secteur informel. Bref, il y a un dédoublement du secteur formel en secteur informel ou chaque activité dite "en règle" a une réplique. Tout se passe comme si l'économie de ces pays affiche deux faces à l'image du dieu Janus. L'informel et le formel sont donc intimement lies, ne serait-ce que par la monnaie dont ils font un usage commun.
En définitive, c'est l'incapacité de l'Etat de répondre aux besoins fondamentaux de la population dans les domaines de l'emploi, de la santé, du logement et de l'éducation qui est à l'origine du foisonnement du secteur informel.
SECTEUR INFORMEL ET DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
Face a la déconfiture et a la désertion des pouvoirs publics, le secteur informel est venu en quelque sorte a la rescousse du modèle légal (formel). Le secteur informel, en Afrique, a pris une importance telle que la Banque Mondiale et le F.M.I. ont pris la résolution de l'encourager et dorénavant d'insérer ses activités dans les stratégies de développement du continent. Au Burkina-Faso et au Mali, par exemple, la Banque Mondiale et le F.M.I. se penchent avec attention sur les projets des paysans regroupes au sein des coopératives. Le but : ramener les activités du secteur informel dans le formel. Ces agents économiques subissent des stages d'initiation aux techniques de gestion a la concurrence et a l'économie de marche.
On suppose que l'Etat facilitera l'accès aux crédits bancaires afin d'améliorer leurs conditions de travail. Somme toute les activités du secteur informel jouent un rôle dynamique dans les économies africaines. C'est même le point de vue du Bureau International du Travail (B.I.T.) qui, pour la première fois, a mis l'accent sur les aspects positifs de ce secteur qui s'avère rentable, productif et créatif. D'ou l'idée de repenser le processus évolutif spécifique du secteur informel qui est un facteur de développement de l'Afrique. Le vrai problème qui se pose est celui de l'articulation des deux secteurs. L'idéal serait qu'il fassent bon ménage. Le développement de ces pays se fera dans ce dualisme ou ne se fera pas.
Le secteur informel occupe aujourd'hui une grande place dans les economies des pays en developpement. Si les premiers travaux se sont d'abord portes sur la dimension reelle du secteur informel, en particulier sur le marche du travail et sur le marche des biens de consommation, ce n'est que plus recemment que les economistes se sont penches sur la dimension financiere du secteur informel.
En effet, il existe egalement une segmentation au niveau des circuits financiers. A cote du systeme financier institutionnel qui ne concerne que les grandes organisations et les agents les plus solvables, s'est developpee une finance informelle qui permet a l'ensemble de la population non bancarisee d'avoir acces au credit et donc de remplacer la finance formelle. Cette finance informelle se caracterise essentiellement par une grande souplesse au niveau organisationnel, de faibles couts, et repose sur des formes traditionnelles tres anciennes. Mais c'est aussi une inadequation des systemes financiers formels face aux exigences du developpement qui a favorise le developpement de ces pratiques.
Le développement de l'économie populaire est essentiel car, dans un avenir proche, elle devrait fournir 93% des nouveaux emplois dans les villes africaines. Presque deux personnes sur trois en vivent.
D'après le BIT (1996), la production du secteur informelle au Sénégal intervient pour 52% dans la production intérieure brute totale, dont 95% dans l'agriculture, 35% dans l'industrie et 50% dans les services. L'emploi dans le secteur informel urbain est passé en 10 ans (1980/1990) de 58 à 77% de l'emploi total. Finalement, pendant la même période, les emplois de l'économie populaire ont plus que doublé.Ceux de l'emploi moderne ont diminué de 2%. Le coût d'un poste de travail serait en moyenne, toujours selon le BIT, 50 fois plus élevé dans le secteur moderne que dans l'économie populaire. Pour l'Afrique entière, certains économistes pensent que l'économie informelle pourrait représenter 2 ou 3 fois l'importance du PNB officiel.
Les politiques menees par les pays en developpement au cours des annees soixante-dix ont conduit a un fort endettement du Tresor aupres de la Banque centrale, ont creuse le deficit budgetaire et celui des entreprises publiques, et les banques ont accumule les creances douteuses. Les politiques des annees quatre-vingts, marquees par un assainissement lie a la liberalisation financiere, ne peuvent resorber l'ensemble des desequilibres financiers et au debut des annees quatre-vingt-dix, le systeme bancaire de la majorite des pays en developpement se trouve tres affaibli.
Dans ce contexte donc, une grande partie de la population, aussi bien urbaine que rurale, se tourne vers le secteur financier informel car elle est exclue des reseaux institutionnels classiques.
On distingue desormais « l'argent chaud » informel lie a la proximite et aux relations sociales personnalisees, et « l'argent froid » anonyme provenant d'organismes bancaires ou d'institutions financieres. Le secteur financier informel est d'une grande heterogeneite et differe selon les pays. Mais la forme la plus connue et la plus repandue de finance informelle est l'association rotative d'epargne et de credit, connue sous le nom de « tontine ». Longtemps ignorees, ces pratiques tontinieres existent pourtant depuis des decennies, et elles constituent un reservoir d'epargne important pour les pays en developpement.
Ces tontines se caracterisent par des relations personnelles tres etroites entre les membres, et leurs mecanismes sont d'une reelle originalite et d'une grande souplesse. Elles se sont developpees, ont evolue pour s'adapter a leur environnement et leur role est d'autant plus important aujourd'hui qu'elles semblent avoir reussi la ou les banques ont echoue, a savoir mobiliser l'epargne domestique.
L'etude de ces tontines montre qu'elles apparaissent comme un systeme financier a part entiere, comparable aux services offerts par les banques. Elles nous renseignent egalement beaucoup sur les habitudes, les besoins et les comportements des populations de ces pays en matiere de finance.
La mobilisation de l'epargne en Afrique, et plus generalement dans l'ensemble des pays en developpement, fait partie des preoccupations des institutions internationales, des hommes politiques, des banques, des universitaires...elle est devenue pour tous un des elements majeurs des strategies de developpement a mener dans les annees a venir.
Nombreux sont les pays en developpement a avoir eu recours aux capitaux exterieurs pour financer leurs activites. Durant la decennie 70, la dereglementation du systeme monetaire international et les excedents de petrodollars ont favorise cette attitude des pays en developpement. Ainsi, pendant longtemps ils ont neglige la mobilisation de leurs ressources financieres interieures.
Des lors, des politiques monetaires et financieres plus rigoureuses se sont mises en place, souvent a la demande des organisations internationales, mais elles n'ont pas fonctionne, et le niveau d'endettement de ces pays s'est encore accru pour atteindre des niveaux qui les mettaient bien souvent dans des situations tres difficiles. Une des mesures recommandee etait de privilegier des taux d'interet bas, mais celle-ci n'a eu pour effets que d'accroitre les differentiels de remuneration entre le credit bancaire et les taux pratiques hors du credit institutionnalise.
Ainsi, l'epargne n'etait plus mobilisee par le secteur financier officiel. Certains avancerent meme qu'il n'y avait pas d'epargne dans ces pays compte tenu du fait que celle-ci n'etait pas deposee aupres des banques. Mais cette hypothese n'est plus valable car on sait aujourd'hui que les populations des pays en developpement ont une forte capacite a epargner.
Depuis plusieurs annees maintenant, nombreux sont les economistes a plaider en faveur de la promotion de l'epargne des menages dans les pays en developpement. En effet, une epargne abondante et reguliere permet a un pays de parvenir a une croissance equilibree.
Mais, meme si on reconnait la capacite d'epargner des populations de ces pays, on s'inquiete toujours de trouver les moyens de faire servir cette epargne au developpement du pays, malgre la presence des banques commerciales dites encore banques de depots, des caisses d'epargne, des cooperatives de credit, etc...
En effet, comme nous l'avons vu, le systeme bancaire dans son ensemble a largement failli dans la tache qui etait la sienne: mobiliser l'epargne nationale.
Or, si les paysans, les ouvriers de la ville, les fonctionnaires, les commercants...tous capables de ne pas depenser chaque jour ce qu'ils gagnent, ne vont pas deposer d'argent dans les institutions modernes creees pour cela, c'est qu'ils en font autre chose.
Les travaux de ces dernieres annees ont montre l'originalite des attitudes et des comportements dans ces pays ou les banques n'ont pas cherche a s'adapter a la population. En fait, les individus s'organisent entre eux pour faire face collectivement a leurs besoins, pour se preter et s'emprunter les uns les autres au sein d'associations qu'ils constituent eux-memes.
De meme, ces travaux ont revele que l'epargne de ces pays etait essentiellement informelle, elle circule et tout particulierement au sein des tontines, encore appelees associations rotatives d'epargne et de credit, ou l'argent est mis a la disposition des uns et des autres.
Ce phenomene tontinier a pris une importance considerable depuis quelques annees, bien qu'il ait des origines lointaines. On parle desormais de finance informelle, par analogie avec l'economie informelle. On se trouve ici en presence d'un veritable systeme, parfaitement organise.
Cette notion de finance informelle est definie par Michel Lelart (1990, p 50) comme des mecanismes originaux qui permettent en effet de faire circuler la monnaie en contrepartie d'une accumulation temporaire des creances et des dettes. Ainsi, la finance informelle englobe tout mecanisme non officiel qui permet de faire circuler temporairement des creances et des dettes ? La finance informelle regroupe donc l'ensemble des transactions effectuees, en marge des regles etablies, par des intermediaires non agrees et/ou non enregistres. Mais, on peut signaler que ces mecanismes ne sont pas dans la majeure partie des cas illegaux car bien souvent les autorites publiques les tolerent.
Il est aujourd'hui de plus en plus evident que le role des institutions financieres informelles dans la mobilisation de l'epargne interieure est plus important que nombreux le pensait. On peut expliquer la place importante des institutions financieres informelles dans les pays en developpement du fait de quelques caracteristiques particulieres qui les differencies des institutions financieres formelles. Tout d'abord, ces institutions ne son pas assujetties aux reglementations sur les taux d'interet, aux directives d'encadrement du credit ou a l'obligation de maintenir des ratios de liquidite specifiques. Ensuite, leurs couts en ce qui concerne les operations de prets et d'acceptation de depots tendent a etre plus bas que ceux des institutions financieres modernes du secteur formel. Elles repondent egalement a des besoins financiers qui ne sont pas satisfaits de facon convenable par les institutions financieres modernes. Enfin, ces institutions adoptent des regles et reglements, directement issus de la culture et des moeurs du pays.
Nous allons ici developper ces caracteristiques apres avoir vu quels sont les principaux intervenants du secteur financier informel. Nous nous attarderons ensuite a definir les avantages mais egalement les limites de cette finance informelle.
I) Les divers intervenants du secteur financier informel.
Il existe une grande variete de besoins financiers auxquels repondent, en partie, une multiplicite de mecanismes informels. On parle souvent des preteurs professionnels, mais de nombreux autres systemes existent, qui s'occupent de la plupart des transactions financieres informelles dans les pays en developpement. Certaines de ces methodes existent depuis des siecles, et d'autres evoluent au fur et a mesure que les contours de la societe et de l'economie se modifient. La finance informelle est tres flexible et tres creative.
On distingue generalement trois grands types d'intervenants au sein du secteur informel, dont l'une des caracteristiques les plus frappantes reside dans la grande diversite des liens qui peuvent exister entre les preteurs, les emprunteurs et les deposants.
Ces trois types sont les suivants:
Les preteurs individuels, qui pretent habituellement leurs propres ressources (bien qu'ils acceptent parfois les depots), on trouve: Les amis, les parents, les proprietaires fonciers, les preteurs ruraux, les fournisseurs d'intrants agricoles, les negociants, les marchands, les preteurs de marches paralleles urbains, etc.
Les groupements de personnes organises sur une base mutualiste, comme les associations rotatives d'epargne et de credit (AREC ou tontines), les chit funds, les associations informelles de credit, les organisations d'auto-assistance ou les fonds familiaux ou tribaux.
Les societes organisees en partenariat (exemple des preteurs sur gages ou des banquiers autochtones, surtout dans les pays en developpement asiatiques), de meme que d'autres intermediaires financiers non bancaires comme les societes de financement, les societes d'investissement, les societes de credit-bail et de location-vente. Malgre la structure corporative des trois derniers types d'etablissements et malgre le fait que leur activite soit reglementee par la loi, ils sont inclus dans le secteur informel car ils echappent, dans une certaine mesure, a la tutelle de la Banque centrale.
A) Les preteurs individuels.
Ceux-ci ont deux types d'activites: soit une activite de pret non commercial, soit une activite de pret commercial.
i)L'activite de pret non commerciale.
Les prets de nature non commerciale sont tres repandus car ils sont profondement enracines dans les traditions locales. Ils sont obtenus aupres d'amis, de parents ou de voisins, peuvent etre en espece ou en nature, et sont generalement accordes sans interet.
C' est une forme tres courante de finance informelle, que ce soit en nombre de transactions ou en valeur. Dans certains pays, ces credits representent la moitie ou plus des prets informels. Le montant de ces prets peut etre tres variable. La principale caracteristique de ces prets est leur reciprocite: il est en effet sous-entendu que l'emprunteur acceptera de fournir un pret au preteur a un moment quelconque du futur. Si les individus concernes ont un acces limite a d'autres formes de finance, la reciprocite peut etre un bon moyen de gerer l'incertitude et le risque, en etablissant et en renforcant des liens interpersonnels. Dans de nombreux pays en developpement africains, les prets entre agents d'une meme famille sont monnaie courante.
Mais les prets consentis par des amis, des parents ou des voisins ne sont pas toujours de nature non commerciale et souvent les taux d'interets pratiques ne sont pas differents des preteurs professionnels, tandis que la relation personnelle tient lieu de garantie.
Il existe cependant un certain nombre de facteurs qui peuvent limiter la possibilite d'obtenir un pret, qu'il soit avec ou sans interet. En effet, dans le cas de catastrophe naturelle, tous les habitants du village auront besoins de fonds pour les reparations et ne pourront pas alors aider les autres membres du village. De meme, la limite superieure est rapidement atteinte dans ce genre de prets qui sont de faible montant et doivent etre completes par des ressources en provenance d'autres sources informelles ou semi-formelles.
ii) L'activite de pret commercial.
Ici, les preteurs exercent une autre activite (entrepreneur, agriculteur) mais disposent d'un capital qu'ils peuvent preter a des tiers. Ces operations de credit informel de nature commerciale peuvent etre a base d'argent, de terres ou de biens marchands.
Les operations de credit a base d'argent dans le secteur informel sont generalement des preteurs professionnels mais parfois aussi des particuliers.
L'activite de pret a base de terres est le fait des proprietaires fonciers et des agriculteurs-preteurs.
Le credit a base de biens marchands revet des formes multiples et fait appel a une grande variete d'intervenants.
Cette activite de pret commerciale prend une place de plus en plus importante dans les pays en developpement du fait que la limite est vite atteinte sur les prets venants de la famille, des amis ou des voisins pour les menages ruraux ou urbains qui y ont recours.
iii) Les garde-monnaie.
Parmi les preteurs individuels, qui pretent donc leurs propres ressources, on peut noter que certains acceptent egalement les depots. Ces garde-monnaie sont en general des personnes ayant le sens des responsabilites. Ils offrent ainsi un lieu sur pour deposer des fonds. Dans la plupart des cas, ces depots ne rapportent pas d'interet, bien que certains donnent parfois des cadeaux ou rendent de menus services a leurs deposants. Le garde-monnaie peut utiliser les fonds deposes a sa guise et sans restrictions. Dans certains cas, les deposants pensent que les garde-monnaie leur rendent service en gardant leur argent. Le montant des depots de chaque personne est generalement peu eleve.
B) Associations mutuelles d'epargne et de credit
Les groupements de personnes organises sur une base mutualiste sont une autre forme d'activite financiere informelle. Ceux-ci fonctionnent selon des regles etablies d'un commun accord par les membres. Il existe essentiellement deux types d'associations informelles exercants des activites d'intermediation financiere: les groupements a seule vocation d'epargne ; et les groupements a vocation d'epargne et de credit.
Dans les associations du premier type, comme les associations a capital fixe et les clubs d'epargne, le but est d'offrir des facilites d'epargne a leurs membres qui ne peuvent acceder a des services d'epargne dans le secteur formel faute de sommes suffisamment elevees pour justifier l'operation bancaire. Les fonds ainsi accumules sont le plus souvent utilises pour un emploi specifique qui peut etre explicite ou non au depart.
La participation a l'epargne mutuelle repond aussi au souci de s'assurer une aide (en especes ou en nature) pour soi-meme et pour sa famille en cas d'urgence comme la maladie, le deces, l'accident, le vol, l'incendie, le chomage, etc.
L'autre type d'association mutualiste est le groupement a vocation d'epargne et de credit, dans laquelle la contribution reguliere de chaque membre au processus d'accumulation de l'epargne lui ouvre le droit de recevoir un pret de la part du groupe, credit qui, la encore, ne pourrait etre obtenu aupres des institutions financieres formelles. Parmi les exemples de ce type d'associations, on peut citer les mutuelles de credit informelles, les associations informelles d'epargne et de credit et les associations rotatives d'epargne et de credit (AREC) (ces dernieres seront etudiees dans le detail lors de la seconde section).
On peut egalement citer, a cote de ces dispositifs informels a vocation financiere, les organisations d'auto-assistance dans lesquelles les services rendus sont en nature : il s'agit d'associations de main-d'oeuvre journaliere, d'associations rotatives de travail, d'associations de travail non reciproque, ou de groupements temporaires.
La structure de base des associations mutuelles d'epargne et de credit dans le secteur informel est la meme : un groupe de personnes ayant un lien commun (famille elargie, amis, residents du meme village ou du meme quartier, salaries d'une entreprise, liens ethniques, etc.) se reunissent pour mettre en commun leurs ressources, quelle qu'en soit l'importance, afin de beneficier de facilite d'epargne et/ou de credit en vue de depenses qu'ils ne peuvent assumer par eux-memes ou pour s'assurer d'une assistance mutuelle en cas d'urgence. Parfois, l'objectif peut etre de contribuer a un projet de developpement communautaire. Les divers systemes qui peuvent exister se distinguent les uns des autres par les conditions d'adhesions, le nombre des membres, le montant et la periodicite des contributions, le mode de gestion, l'emploi des fonds, le mode de deboursement des prets, etc.
C) Les societes organisees en partenariat.
Celles-ci se retrouvent dans certains pays ou le secteur informel prend des formes plus complexes et plus evoluees, non seulement du point de vue de ses caracteristiques structurelles et operationnelles, mais aussi du point de vue de la place qu'il occupe dans l'activite financiere globale.
Le cas de l'Inde est le plus connu : A cote des activites d'epargne et de credit des preteurs individuels et des petits groupements, il existe toute une gamme de « compagnie » ou de « societes » qui, en depit de leur nom a consonance formelle, sont considerees comme faisant partie du secteur financier informel indien.
Le pret sur gages est une des formes les plus ancienne de societe organisee en partenariat. Certains preteurs sur gages exercent cette occupation a plein temps alors que pour d'autres, celle-ci n'est que marginale, leur activite principale etant le pret ou le commerce. Dans certains pays, et comme nous l'avons dit souvent en Asie, les bureaux des preteurs sur gages sont affilies aux banques.
Ces bureaux ont plusieurs caracteristiques: ils octroient generalement des prets pour de courtes durees, et resolvent les problemes de la garantie de facon peu couteuse en demandant aux emprunteurs de physiquement echanger un gage contre leur emprunt. Contrairement aux banques, aux preteurs et aux commercants, les preteurs sur gages n'ont pratiquement pas besoin d'informations concernant leurs emprunteurs sauf dans le cas ou ils craignent de recevoir des marchandises volees. Le preteur sur gage realise un benefice grace a l'interet percu sur le pret ou sur la difference entre le montant des prets et les recettes des ventes d'articles gages lorsque les prets sont defaillants.
II) Caracteristiques de la finance informelle.
Le secteur financier informel englobe donc l'ensemble des transactions financieres qui s'effectuent en dehors des reglementations imposees a l'activite du secteur financier formel en matiere de taux d'interet et d'allocation, du credit, de reserves obligatoires et d'autres mesures analogues. Les transactions financieres informelles echappent aussi a l'impot. On peut caracteriser le secteur informel par la souplesse des operations et des conditions de pret, ce qui lui confere un certain nombre d'avantages comparatifs economiques sur le secteur financier formel.
On peut en citer quatre par exemple:
Absence de conditions preetablies. En effet, pour participer a une de ces associations, il n'y a pas d'autorisation a solliciter, pas de demarches a effectuer, pas de garanties a apporter, pas de formalites a remplir, pas de delai a respecter. Dans les associations, les membres se donnent eux-memes leurs regles.
Absence de frais de gestion. L'administration est reduite au minimum ; quelquefois un cahier ou sont inscrits les noms et les sommes versees et rendues, le plus souvent rien. Les seuls frais sont les boissons qu'on achete avant chaque reunion de l'association. Il n'y a pas de local, les membres se reunissent chez les uns et les autres.
Absence de cadre fixe. Les associations peuvent regrouper quelques membres ou quelques centaines et durer quelques semaines ou plusieurs annees.
Absence de controle. Comme elles reposent toutes sur des relations personnelles, ces pratiques sont vecues quotidiennement par la population et, dans une large mesure, collectivement entre les membres de l'association.
D'autres points peuvent egalement caracteriser cette finance informelle:
La finance informelle est omnipresente dans les pays a faibles revenus. Elle se concentre le plus souvent dans les lieux ou s'effectuent des transactions commerciales portant sur des montants importants, notamment les zones urbaines, quel que soit l'etat de developpement des marches financiers formels.
Un grand nombre de pauvres participent a la finance informelle. Mais, les emprunts et depots informels sont tout aussi courant a l'interieur d'une classe sociale qu'entre differentes classes economiques. Les marches financiers informels sont d'une grande complexite et ne correspondent pas au simple cas de figure ou les riches pretent aux pauvres.
Les marches de finance informelle sont adaptes a l'environnement economique et social local. Ils sont durables et beaucoup representent des efforts soutenus. Si certaines formes de finances disparaissent, d'autres font leur apparition, et ceci aussi bien dans des pays ou les marches financiers formels fonctionnent efficacement que dans des pays ou les marches financiers formels sont fortement deprimes. Croire que la finance informelle disparait lorsque les marches financiers formels prosperent serait une erreur.
L'offre de pret n'est pas le seul service que propose la finance informelle, et l'opportunite de faire des depots est une composante importante de la finance informelle. Chaque unite monetaire qui circule sur le marche non officiel est le resultat de l'epargne d'une autre personne. Des prets informels de montants considerables correspondent a des epargnes financieres informelles de montants equivalents, et beaucoup de participants des marches informels sont la pour profiter des opportunites d'epargne que leur offre le systeme.
Sur les marches de la finance informelle, contrairement a ce que beaucoup pensent, il existe extremement peu de cas de profits resultant de situations d'exploitation ou de monopole. Les couts d'opportunite de fonds eleves, les couts de transaction importants, les risques serieux associes aux prets et le manque de solvabilite des emprunteurs semblent expliquer les taux d'interet eleves pratiques par une petite partie des preteurs informels.
Alors que la finance informelle a longtemps ete consideree comme un fleau pour les plus pauvres, il est reconnu desormais que nombre de pauvres beneficient de l'existence de ces marches financiers informels. Si parfois, certains emprunteurs de prets informels ont des difficultes a rembourser leurs dettes, la plupart d'entre eux realisent un profit net grace a leur emprunt, et le rembourse sans aucun probleme. Par ailleurs, les mecanismes informels constituent la principale technique d'epargne de beaucoup de pauvres et les revenus des prets representent une grande partie des revenus de certains pauvres.
On considere egalement que la finance informelle ameliore l'efficacite de l'allocation des ressources. Elle permet a des millions d'individus, d'entreprises et de menages des pays en developpement qui ont des fonds en surplus de les redeployer sous forme de prets consentis a d'autres individus et entreprises qui ont de meilleures opportunites economiques. Le resultat est une augmentation du rendement et de la formation du capital par rapport a ce qui se passerait si les marches financiers informels ne fonctionnaient pas ou ne pouvaient pas fonctionner.
Il semble que, dans de nombreux cas, la finance formelle et la finance informelle se completent plutot qu'elles ne se substituent l'une a l'autre. En effet, les depots informels aboutissent souvent dans des banques, et les fonds provenant des prets formels, lorsqu'ils sont depenses, circulent souvent via des reseaux informels.
Le credit informel revet donc differentes formes et il est present dans les zones urbaines comme dans les zones rurales. Les intervenants, nous l'avons vu, sont pour la plupart des individus, et les transactions reposent sur la confiance nee des relations personnelles entre preteur et emprunteur. Generalement, aucune garantie n'est exigee : la garantie d'une creance est assuree par la conduite passee de l'emprunteur en matiere de remboursement, la bonne foi personnelle et la pression sociale pour maintenir les versements, tandis que la souplesse au niveau des taux d'interet appliques permet au preteur de couvrir le cout d'opportunite des fonds engages et le risque de defaut de paiement. La paperasserie et la tenue d'une comptabilite complexe et detaillee sont egalement absentes.
III) Les avantages de la finance informelle.
La finance informelle est aussi presente dans les pays en developpement du fait qu'elle resout souvent des problemes que la finance formelle est dans l'incapacite de resoudre. Dale W Adams ( 1994, p 31) distingue six raisons pour expliquer cet etat de fait.
1) Le type de service rendu: ceux-ci sont extremement varies et montrent donc que meme les populations des pays a bas revenus sont demandeurs d'une large gamme de services financiers. Ils sont egalement tres differents de ceux des programmes traditionnels de credit. En effet, les depots, les prets de petits montants et les prets de petite duree constituent la majorite des transactions financieres informelles, services qui sont rarement offerts par les programmes formels de credit pour pauvres. On peut des lors en deduire que bon nombre de ces programmes traditionnels de credit offrent des services financiers inadequats.
2) Un systeme fonde sur la discipline: la finance informelle requiert de la part de ses participants un comportement hautement discipline. Les preteurs informels doivent s'auto discipliner pour epargner les fonds qu'ils preteront, et doivent egalement faire preuve de plus de discipline pour reunir les informations suffisantes sur leurs emprunteurs potentiels afin de preter cet argent sur la base de la solvabilite. Ce n'est qu'apres quelques annees que les preteurs informels sont capables de maitriser ces talents necessaires au developpement de leur affaire. Etant donne que la plupart des preteurs informels investissent des fonds propres dans leurs prets, ils considerent que le credit est un privilege et non pas un droit; et ils pensent que les activites de pret sont une transaction serieuse et non pas un jeu ou il s'agirait d'accorder des faveurs.
De leur cote, les emprunteurs informels doivent aussi faire preuve de discipline afin d'etablir et d'augmenter leur solvabilite aupres des preteurs informels ou des membres du groupe. La possibilite d'emprunt informel est un privilege qui n'est acquit bien souvent qu'apres de multiples etapes telles que: epargner avant d'emprunter, rembourser de petits prets avant d'en recevoir de plus important et toujours rembourser ses dettes pour maintenir l'acces a la finance informelle. Les resultats d'une telle discipline permettent de solidifier les relations professionnelles entre preteurs et emprunteurs, relations qui sont la base de marches financiers stables, surs et durables.
3) Epargne: L'echec de la plupart des systemes financiers formels a produire des services de depots seduisants n'en est que plus grand lorsque l'on s'apercoit des gros montants d'epargne qui font surface dans les marches financiers informels et qui indiquent donc une forte tendance a l'epargne volontaire. Cet echec a mobiliser formellement des depots s'explique par quelques facteurs: les banques rurales et les cooperatives n'acceptent pas de depots ; la plupart des depots rapportent des taux d'interet reels negatifs ; la plupart des banques centrales offrent des facilites de reescompte trop bon marche. Les systemes financiers formels qui devraient encourager la mobilisation de depots volontaires ont ete concus surtout pour distribuer des fonds bons marches, en provenance de gouvernements et de donateurs.
4) La reciprocite: la plupart des formes de la finance informelle impliquent cette reciprocite. Cette reciprocite s'applique d'une part, entre emprunts et depots, et d'autre part entre l'emprunteur et le preteur sachant que ces roles pourront etre inverses dans le futur si le preteur en a besoin. Ces reserves de credit, non utilisees, sont tout particulierement importantes pour les habitants des pays pauvres. Les programmes traditionnels formels de credit offrent rarement des lignes de credit ( ou plusieurs prets) durant une periode donnee, et ils ne fournissent pas non plus de credits d'urgence.
5) Les innovations financieres: La finance informelle entraine un certain nombre d'innovations financieres qui permettent de reduire les couts de transaction, et notamment pour les deposants et emprunteurs. Il est en effet tres etonnant de constater la rapidite avec laquelle la finance informelle peut innover dans le but de s'adapter a des conditions variables telles que l'inflation, la prosperite ou les problemes economiques. Comme nous l'avons deja fait remarquer, flexibilite et souplesse sont les deux caracteristiques majeures de la finance informelle. Meme si les marches financiers formels sont eux aussi innovants, ces innovations sont la plupart du temps mal utilisees car elles cherchent trop a eviter les reglementations. De plus, la finance formelle est souvent trop fragile et trop rigide pour pouvoir repondre de facon efficace a des changements economiques. Ce constat fait, on ne peut qu'encourager les dirigeants des institutions financieres formelles a mieux observer les innovations et evolutions de la finance informelle, et a essayer d'en imiter certaines.
6) Les couts de transaction: La finance informelle permet de maintenir des couts de transaction peu eleves pour les emprunteurs et les epargnants en apportant les services financiers aux endroits et aux moments qui conviennent a ses clients. A l'inverse, la finance formelle tend avant tout de reduire les couts de transaction de l'intermediaire financier et se preoccupe peu des consequences pour les deposants et les emprunteurs. Il est en effet assez rare que les clients des intermediaires financiers formels puissent venir faire leurs depots et aller chercher leurs emprunts a des heures qui leur conviennent.
On peut egalement remarquer que les intermediaires formels cherchent avant tout a cultiver leurs relations avec les sources de fonds importantes, c'est-a-dire avec les agents gouvernementaux, les employes des banques centrales et les employes des organismes donateurs, et que par contre, les emprunteurs et deposants de petites sommes sont bien souvent traites avec dedain. A l'inverse, les intermediaires informels se preoccupent presque toujours uniquement de maintenir des relations de qualite avec leurs emprunteurs et deposants.
IV) Les limites de la finance informelle.
On a donc vu que de nombreux points positifs semblaient caracteriser le secteur financier non officiel. Cependant, il ne faut pas croire que celui-ci est sans limites. On distingue en regle generale trois problemes auxquels se heurte le secteur financier informel.
-Absence de reelle intermediation financiere dans le secteur financier informel. On ne peut en effet comparer le secteur financier informel aux banques dans ce domaine. Il semble que les organisations informelles ne soient pas en mesure de remplir en meme temps les deux fonctions qui caracterisent un intermediaire financier, c'est-a-dire collecter des ressources courtes et transformer celles-ci en emplois longs pour financer les besoins de financement. En effet, si le secteur financier informel semble pouvoir acquerir de l'information sur les emprunteurs a moindres couts et maintenir la confiance des deposants, principalement pour les zones rurales, il ne semble pas pouvoir supporter le cout lie a la defaillance eventuelle des emprunteurs ( bien que ceci arrive rarement du fait de la pression sociale exercee par le groupe). Ainsi, les prets accordes dans le secteur informel seront surtout des prets a court-terme limitant ce risque de defaillance de l'emprunteur.
Cependant, de nombreux auteurs insistent sur la complementarite existante entre finance informelle et finance formelle. Le secteur formel serait specialise dans les prets de montants importants dans les zones urbaines, et le secteur informel serait specialise dans les prets de plus petits montants principalement en zones rurales.
-La finance informelle ne finance que tres peu l'acquisition de biens d'investissement. Le fait que les prets fournis dans le secteur financier informel soient de courte duree et souvent de faible montant interdit des operations de long-terme. Cependant, certaines tontines dans certains pays (en particulier asiatiques) encouragent les comportements financiers de long-terme de leurs membres.
-Le caractere usuraire des taux d'interet pratiques. Le fort taux d'interet pratique dans le secteur financier informel proviendrait de ce que le risque prit par les preteurs est plus eleve par rapport au risque prit dans le secteur formel. Il pourrait egalement venir du fait d'une disponibilite quasi-immediate des fonds dans le secteur informel. Mais d'autres facteurs semblent pouvoir expliquer le phenomene (mobilite geographique des emprunteurs et des preteurs, repression financiere, renforcement de la concurrence de la part des institutions informelles,...).
V) Conclusions sur la finance informelle.
Donc, c'est avant tout la souplesse qui caracterise la finance informelle. Les couts de transaction du secteur informel sont generalement peu eleves, et l'acces aux financements informels est relativement facile en comparaison avec le secteur formel. La souplesse des conditions et des operations de credit qui permet d'adapter les services financiers a des besoins specifiques, la rapidite de traitement des demandes de prets et, surtout, la volonte de traiter les petites sommes qui correspondent aux besoins et a la capacite de la majorite de la population font que les mecanismes informels sont mieux adaptes que les mecanismes formels aux besoins du milieu rural et urbain, dans lequel ils operent. Ceci explique aussi en partie que le credit informel soit plus repandu que le credit formel malgre son cout plus eleve.
La finance informelle, par le dynamisme qui la caracterise, est peut etre le point de depart qui permettra bien des mutations dans les pays en developpement. Les dynamiques les plus fortes viendront peut etre des tontines qui, comme nous allons le voire dans la seconde section est certainement la forme la plus evoluee, mais aussi la plus aboutie de la finance informelle. L'etude detaillee de ces tontines va nous montrer l'ampleur de ce phenomene et pourquoi il correspond bien aux mentalites de ces populations des pays en developpement.
Nous avons vu dans la section precedante les caracteristiques du secteur financier informel, et nous allons etudier maintenant plus en profondeur le phenomene tontinier, phenomene en pleine expansion aussi bien en Afrique, en Asie, en Amerique Latine, voire meme dans les communautes etrangeres des metropoles des pays developpes.
Curieusement pourtant, le phenomene tontinier est reste longtemps meconnu. Il n'etait etudie sur le terrain que par quelques chercheurs ou anthropologues isoles. Mais la faillite du systeme bancaire et financier officiel dans de nombreux pays en developpement a mis en evidence le role extremement important et toujours croissant joue par les circuits financiers informels dont les tontines sont une des composantes essentielles, si ce n'est la plus importante..
Des lors, l'interet porte aux tontines allait donner lieu a une multitude de travaux qui revelerent enfin l'ampleur de ce phenomene.
Dans les annees soixante-dix, F. BOUMAN allait donner aux tontines une appellation plus scientifique : Associations rotatives d'epargne et de credit (AREC, ou ROSCAs en anglais). De leur cote, d'autres economistes organisaient des colloques sur le sujet, et la revue « Savings and Developpement » traitant abondamment des tontines faisait son apparition dans les kiosques. La Banque mondiale elle-aussi leur consacrer dans son « rapport sur le developpement » de 1989 tout un chapitre.
Les tontines existent donc sur tous les continents du monde, mais elles sont le plus repandues en Afrique et en Asie. Bien qu'elles prennent souvent des noms differents d'un pays a l'autre, partout elles presentent les memes caracteristiques qui tiennent a ce que les relations entre les membres sont particulierement etroites.
Cette seconde section est consacree a l' etude des grands traits specifiques aux tontines africaines et asiatiques, c'est-a-dire les differentes formes existantes, le role qu'elles jouent dans ces societes, leur fonctionnement, etc.... Nous etudierons egalement, dans le detail les tontines d'un certains nombre de pays de ces deux continents afin de s'apercevoir que les variantes regionales, ethniques ou nationales du modele de base sont relativement nombreuses.
LES TONTINES
I) DEFINITION.
1) La tontine est une association de personnes qui, unies par des liens familiaux, d'amities, de profession, de clan ou de region, se retrouvent a des periodes d'intervalles plus ou moins variables afin de mettre en commun leur epargne en vue de la solution des problemes particuliers ou collectifs.
Cette definition est proche de celle donnee par BOUMAN (1977) qui explique que « les tontines sont des associations regroupant des membres d'un clan, d'une famille, des voisins ou des particuliers, qui decident de mettre en commun des biens ou des services au benefice de tout un chacun, et cela a tour de role ».
2) La forme la plus elementaire de la tontine consiste en une formule mixte d'epargne et de credit qui fonctionne comme suit. Les participants versent regulierement des cotisations de montant fixe a un fonds commun qui est distribue tour a tour a chacun des membres, designe en general par tirage au sort. Quand chaque membre a recu le fonds une fois, le cycle doit normalement recommencer. Il faut noter que le premier membre a recevoir le fonds beneficie d'un pret sans interet, tandis que le dernier a le recevoir epargne tout au long du cycle sans etre remunere (voire meme un taux d'interet negatif si l'inflation est forte) pour toucher a la fin le meme montant qu'il aurait accumule en epargnant regulierement a titre individuel. Les autres membres se trouvent, selon leur rang d'acces au fonds, en position de debiteur ou de crediteur : leur participation leur permet neanmoins de beneficier de la somme totale plutot que s'ils avaient epargne par eux-memes.
II) L'ORIGINE DES TONTINES.
Les tontines existaient bien avant l'introduction de la monnaie dans l'economie. Elles plongent leurs racines dans l'histoire lointaine des peuples concernes.
En France aussi, autrefois, les paysans avaient l'habitude de travailler ensemble dans le champ de chacun a tour de role, ou de reparer ensemble le toit des maisons, l'une apres l'autre.
Les pays africains de leur cote faisait de meme. En effet, les Africains, eux aussi, se sont depuis longtemps groupes pour travailler ensemble successivement dans le champ de chacun d'eux ou construire chaque maison l'une apres l'autre dans le village. Ils constituaient de cette facon une tontine de travail qui pouvait servir par exemple a creuser les tombes, ou alors une tontine en nature pour acheter des tuiles ou organiser une fete. Ce n'est que plus recemment, quand la monnaie a commence a circuler, qu'ils ont constitue des tontines d'argent.
Il n' y a que peu de temps que des ecrits mentionnants l'existence de tontines en Afrique sont apparus. En 1952, W.R. Bascom parle de l'Esusu au Nigeria et dans les pays voisins ou il est pratique couramment par les musulmans yorubas. Selon Ardener, l'Esusu serait apparu en realite vers le milieu du 19eme siecle.
Puis, au cours des annees suivantes, de plus en plus d'informations sur ce type de pratiques vont permettre de mieux connaitre les mecanismes tontiniers, et de s'apercevoir que les tontines existent en fait dans de tres nombreux pays d'Afrique. Ce sont les pays d'Afrique de l'ouest qui feront d'abord l'objet d'etudes sur les tontines, et en particuliers le Nigeria, la Sierra Leone ou il semble que le phenomene soit tres ancien.
La litterature sur les autres pays d'Afrique de l'ouest rapporte que c'est aux alentours de la fin du dix-neuvieme siecle et au debut du vingtieme siecle que les tontines ont fait leur apparition. Les tontines semblent etre beaucoup plus recentes en Afrique de l'est.
Contrairement a l'Afrique, les choses sont nettement plus anciennes en Asie. Au Japon, par exemple, l'apparition des premieres tontines - avec argent - daterait de 1275, et. en Coree, le « Kye » serait peut etre apparu des le neuvieme siecle.
Certains auteurs, specialises dans l'etude des tontines asiatiques, pensent qu'elles sont apparues des le 2e siecle apres Jesus Christ. L'hypothese qui parait la plus vraisemblable a leurs yeux est que les tontines de credit, qui etaient en realite des societes d'entraide, doivent leur origine a l'influence bouddhique et au role joue par les monasteres. Les mujins auraient alors pris leur essor a la fin du VII?‹ siecle.
Quelle que soit leur anciennete, ces pratiques n'ont guere cesse depuis, tout en evoluant. Il y a donc plusieurs siecles, des « societes pecuniaires », qui ressemblent fort aux tontines actuelles, etaient pratique courante dans l'empire chinois ou tout le monde se reunissait par groupe et mettait ses ressources en commun. La contrainte etait tres forte, et il n'y avait quasiment pas de defaillance. L'initiateur de cette societe pecuniere profitait en general toujours du premier tour, mais si un membre etait en grosse difficulte, il pouvait obtenir l'argent en priorite. Le systeme de base est reste le meme aujourd'hui, comme nous le verrons par la suite. Certains avaientt meme imagine que chaque mois la mise de ceux qui n'avaient pas encore profite du lot serait legerement augmentee ; c'etait la un moyen original d'introduire l'interet dans ces operations d'epargne et de credit...L'interet est lui aussi toujours present, bien que de facon differente. C'est le systeme des encheres, qui est encore utilise dans bien des pays de la region.
La tontine est egalement apparue tres tot dans d'autre pays d'Asie. Par exemple, un contrat du quatorzieme siecle fait etat d'une telle pratique au japon ou on la trouve sous l'appellation de Kou. Ces tontines existaient deja dans ce pays un siecle plus tot des 1275. On aurait meme retrouve cette appellation dans des textes datant de 606. En Coree, le Kyes aurait ete pratique des le IX?‹ siecle!. Malheureusement, on ne dispose que de tres peu d'informations sur l'origine des tontines dans les autres pays asiatiques.
Le Kou n'est plus pratique actuellement au Japon, mais il y a toujours des Kyes en Coree, comme il y a des arisan en Indonesie, des paluwagan aux Philippines, des pia huey en Thailande, des kutu en Malaisie, des hui au Vietnam; des dhikuti au Nepal, des sandes en Papouasi-Nouvelle Guinee, et, bien sur, des chitt aux Indes, et des cheetu au Sri Lanka. On rencontre certes quelques variantes ici ou la, mais ce sont partout les memes pratiques, ce sont les memes formules de base....Il s'agit bien de tontines.
Cette appellation de tontine est apparue assez vite dans l'ensemble de ces pays. Le mot vient d'un financier italien prenomme Tonti qui avait convaincu Mazarin, vers 1650, d'utiliser une nouvelle formule d'emprunt pour renflouer les caisses de l'Etat. Aux tontines publiques ont succede des tontines privees qui permettaient de preparer sa retraite ou de s'assurer sur la vie. Il est plutot etonnant de retrouver cette expression francaise utilisee dans tous ces pays. On la rencontre meme dans le Chitt Funds Act promulgue a Singapour en 1971 qui s'y refere expressement.
Selon T. Pairault (1990), le terme semble avoir ete utilise pour la premiere fois par un juriste francais dans un ouvrage publie a Saigon en 1905...l'annee meme ou une nouvelle loi sur les tontines est promulguee en metropole, ceci expliquant cela!. Les tribunaux d'Indochine ont ensuite a plusieurs reprises utilise la formule, les commentateurs d'arrets l'ont expliquee, et les juristes ont fini par se rendre compte que dans les pays voisins ces pratiques etaient les memes, et donc une appellation commune serait beaucoup plus simple. Cette explication laisse cependant sans reponse la question de savoir comment l'expression est passee du continent asiatique au continent africain.
III) LES TONTINES AFRICAINES:
A) GENERALITES
Les tontines africaines sont sans doute celles qui ont ete le plus etudiees. Elles sont, comme nous le verrons dans la section suivante, presentes dans la majeure partie des pays africains. Avant de decrire quelles sont les finalites des tontines africaines, les acteurs qui en font partie et les differentes formes existantes, nous allons voir quelques regles de base qui permettent le bon fonctionnement de ces tontines;
-Constitution: en regle generale, la population qui adhere aux tontines est souvent d'origine rurale. Les membres qui se regroupent se connaissent toujours a l'avance, et donc, bien que l'adhesion soit libre, elle est le plus souvent selective. Dans ce cas, on parle de tontine fermee par opposition a la tontine ouverte qui peut regrouper des personnes ne se connaissant pas a l'avance mais decidant de former une tontine a l'initiative de l'une de ces personnes, ou alors une tontine ou des adherents peuvent parrainer une personne de leur entourage.
Mais le facteur predominant reste la connaissance des membres entre eux et donc la confiance, confiance qui bien souvent constitue un gage de securite.
L'aire geographique peut etre tres large, et la taille peut varier enormement. De meme, une tontine peut etre mixte, ou ne regrouper que des hommes ou que des femmes. Mais la composition de la tontine ainsi que sa taille jouent bien evidemment un role fondamental vis-a-vis des criteres de confiance et de securite.
-Duree: celle-ci est tres variable. La tontine est constituee pour un cycle, renouvelable par tacite reconduction. Donc, une tontine peut etre illimitee si les membres le decident, ou elle peut s'arreter apres un tour complet pour telle ou telle raison. Certaines tontines tentent de se premunir contre les risques sociaux tels que le deces, la maladie, les changements de domicile,...et elles prennent alors des precautions des la constitution de la tontine (cautions, avals, provisions, etc...).On peut egalement souligner que parfois un cycle trop long peut engendrer la lassitude des membres ce qui conduit a des demissions ou des oublis de paiement.
-Reunions: Les reunions ont lieu a chaque tour. Elles peuvent se faire chez le president, mais s'effectuent le plus souvent chez l'un ou chez l'autre des membres a tour de role. C'est au cours de ces reunions que sont prises les decisions, le plus souvent sous forme de consensus. La reunion est en general l'occasion de passer un agreable moment, permettant d'echanger des informations, de parler de ses affaires, de ses projets, de ses soucis,...Parfois les reunions sont aussi l'occasion de resoudre les problemes internes de la tontine.
La presence a ces reunions est obligatoire, et la ponctualite est de mise. Dans le cas contraire, une sanction peut etre appliquee soit en nature soit en numeraire. En effet, la presence aux reunions est consideree comme un devoir moral, et le non-respect de celui-ci peut entrainer la perte de confiance aupres du groupe. De meme, la discipline est de regle lors des reunions, et comme nous le verrons en detaillant les acteurs de la tontine, si cette discipline n'est pas respectee, le censeur peut etre amene a infliger une amende a l'auteur du desordre.
-Financement: Seuls les apports des membres de la tontine permettent de financer celle-ci. La tontine n'est pas bonifiee ou enrichie par des apports exterieurs aux membres. La constitution d'une caisse par le tresorier permet de faire face a certains frais supplementaires pouvant intervenir lors du cycle. Cette caisse (egalement appelee cagnotte ou tirelire) est alimentee soit par un versement initial qui n'est pas redistribue par la suite, soit par un versement au cours du cycle qui est demande aux participants en cas de besoin.
-Fin de la tontine: pour marquer la fin de la tontine, une grande fete est generalement organisee (Mais des fetes ont egalement lieu tout au long de la tontine). La fin de la tontine est en meme temps le debut de la suivante, et les participants profitent de cette occasion pour mettre au point les conditions dans lesquelles ils vont maintenir en vie l'association.
a) Finalites des tontines africaines:
Instrument d'epargne, systeme de credit, rassemblement d'amis pour des echanges d'idees, clubs de rencontres, reseau d'influence sociale, lieu de partage des joies familiales, groupe de soutien pour les moments difficiles et notamment pour les deuils, la tontine est tout cela a la fois. En fait, chaque membre y trouve des avantages qui lui sont propres. On peut signaler tout de meme que pour les jeunes, la tontine est d'abord un instrument economique, alors que pour les plus anciens, elle permet avant tout la solidarite collective.
Trois grandes finalites se degagent tout de meme:
Les tontines africaines ont avant tout une vocation sociale. Elles ne sont que l'une des innombrables formes d'associations existantes, a cote des reunions de jeunes, des groupements de femmes, des clubs d'epargne qui fleurissent dans les villages et dans les villes et qui permettent aux africains d'exprimer leur sens de la solidarite. La tontine privilegie le groupe par rapport a l'individu dont le comportement etait regi par les principes de vie communautaire imposes par les moeurs et les coutumes. La tontine est une sorte de caisse de prevoyance a laquelle chacun des membres adhere en prevision de difficultes qui peuvent survenir, par exemple au plan familial. En effet, le besoin de securite face aux differents risques sociaux a rendu necessaire le recours aux tontines, celles-ci devenant de puissants moyens de couverture sociale. (Citons par exemple le cas d'un adherent perdant un proche parent, il obtiendra un secours qui l'aidera a faire face aux frais d'obseques.
La tontine est aussi un moyen de mener un projet en commun, et toujours une occasion de rencontre.Par le biais de la tontine, un individu recherche egalement la renommee sociale.
Les tontines ont egalement un role economique. Il s'agit d'utiliser des fonds, soit pour un investissement a court terme, soit pour un evenement prevu ou imprevisible, de maniere collective ou individuelle. Dans le cas d'un usage individuel, les adherents ont parfois l'obligation d'indiquer l'usage qu'ils vont faire de l'argent qu'ils vont receuillir en exposant leur projet aux autres membres. Ils doivent aussi parfois accepter que l'emploi des fonds collectes soit surveille par un membre de l'association.
Enfin, les tontines ont un role financier. La tontine africaine est une technique eprouvee de mobilisation de l'epargne. La participation a une de ces tontines implique l'obligation de verser periodiquement une cotisation. Ces cotisations peuvent etre attribuees au membre qui en a le plus besoin, ou dans le cas d'un ordre preetabli, elles seront attribuees selon cette regle, bien qu'il existe la possibilite d'echanger voire d'acheter un tour.
b) Les acteurs de la tontine
Nous allons decrire ici les differents postes que l'on peut rencontrer dans ces tontines africaines, bien qu'ils peut y avoir quelques variantes de l'une a l'autre.
A la base se trouvent bien sur au depart les fondateurs de la tontine. Ceux-ci peuvent, dans certains cas, avoir des droits particuliers les distinguants des autres membres. Par exemple, la ou un candidat devrait, pour etre accepte, obtenir le parrainage de deux anciens membres, il lui suffira d'un seul parrain si celui-ci est un membre fondateur. Il arrive egalement que ces fondateurs se partagent les droits d'entree qui sont demandes aux nouveaux arrivants.
Chaque association est animee par un bureau ou commission de coordination dont la composition est assez variable. Ce bureau comprend en regle generale:
-Un president qui est en principe elu ( on notera qu'il est souvent le fondateur de la tontine). Il assure la direction generale de la tontine, preside au deroulement des seances, assure l'execution des decisions prises au cours d'une seance et veille de maniere generale a la bonne marche de la tontine. Il est en meme temps le garant moral de la tontine, en ce sens que les adhesion des nouveaux membres sont largement tributaires de la confiance qu'il inspire. De son dynamisme depend d'ailleurs celui de l'ensemble de la tontine, et notamment sa capacite a s'etendre soit a l'ensemble du village, soit a d'autres villages, en zone rurale, au quartier ou a des personnes venant d'autres milieux ethniques ou socio-professionnels en zone urbaine.
Dans certains cas, il est assiste d'un ou plusieurs Vice-presidents. Ceux-ci sont, tout comme lui, choisi parmi les notables du village, dont la moralite est etablie et qui jouissent de ce fait d'un capital de confiance de la part des membres, ou, en zone urbaine parmi les plus ages ou en fonction de la fonction exercee dans la vie professionnelle.
-Le secretaire tient les archives de la tontine qu'il met a la disposition des membres pour consultation en cas de besoin. On se refere a lui pour l'interpretation et le respect scrupuleux du reglement. Il remplace le President en cas d'empechement. Sa fonction est tres importante du fait qu'il signe toujours les documents attestants du versement des fonds, ou des decaissements en fonction des decisions prises au cours de l'assemblee.
-Le tresorier tient la comptabilite de la tontine et remplace le secretaire en cas d'empechement. Il a la garde des fonds percus, notamment ceux des caisses d'epargne et de prets, et ceux des caisses de secours ou d'assistance. Il en assure la garde sous sa propre responsabilite, de telle sorte qu'en cas de deficit dans les comptes il est tenu d'en assurer le financement sur ses ressources personnelles. De ce fait, le choix d'un tresorier est un exercice difficile.
-Les commissaires aux comptes verifient la comptabilite de la tontine. Leur role prend une importance particuliere en fin de cycle, lorsqu'il faut repartir les interets entre les differents membres de la tontine.
-Enfin, le censeur veille a la discipline lors des seances de la tontine. C'est a lui qu'incombe la charge d'appliquer les amendes et penalites en cas de retard, de troubles, etc...
c) Les diverses formes de tontines:
Il existe plusieurs types de tontines, chacune d'entre-elles etant, dans sa composition, a dominante professionnelle ou geographique. Les tontines professionnelles ou socio-professionnelles sont les tontines: -de cadre -de fonctionnaires -d'agriculteurs -d'artisans -de commercants -d'entreprise...
Les tontines geographiques sont les tontines: -de quartiers -de villages -des Africains en France -de l'elite en R.C.A. .....
On peut distinguer trois types principaux de tontines: les tontines mutuelles, les tontines commerciales, et enfin les tontines financieres.
i) Les tontines mutuelles:
Ces tontines sont les plus repandues. Elles reposent sur la solidarite entre membres qui se connaissent bien.
Les tontines mutuelles peuvent etre definies comme des fonds d'epargne rotative ou les levees beneficient a chacun des societaires selon un ordre preetabli, mais revisable. Chacun peut preter et emprunter et remplacer une creance par une dette. Ces creances et ces dettes ont plusieurs caracteristiques particulieres:
-Elles ne sont assorties d'aucun interet. En effet, les creances ne rapportent rien, et les dettes ne coutent rien non plus. Ainsi, l'epargne et le credit sont gratuits.
-Il n'y a pas d'intermediaire. Tous les adherents ont certes des creances et des dettes, mais ils les ont les uns envers les autres du fait que la tontine ne dispose pas d'une personnalite juridique propre.
-Les creances et les dettes se compensent parfaitement tout au long du cycle et s'annulent au dernier tour. L'accumulation n'est ici que temporaire.
ii) Les tontines commerciales:
Dans cette forme de tontine, les fonds sont collectes par un tiers qui a pris l'initiative de la creation du groupe et qui joue le role de banquier, prelevant une commission pour le service qu'il rend d'ajuster au mieux l'epargne collectee et les prets debourses.
Ces tontines commerciales ne sont pas veritablement des tontines au sens propre du terme, puisqu'il s'agit le plus souvent d'un accord bilateral entre le « banquier ambulant » et son client qui n'a, comme seule initiative, que de mettre en concurrence les banquiers ambulants au niveau des eventuels services offerts et, notamment, du taux de garde reclame pour garder l'argent en securite.
Dans cette forme de tontine, on peut egalement parler de creances et de dettes. En effet, la creance du client augmente au fur et a mesure qu'il depose son epargne chez le tontinier, qui lui, a l'inverse voit sa dette augmenter d'autant. La creance des clients et la dette du tontinier sont la contrepartie l'une de l'autre: elles progressent a chaque versement et diminuent lors du remboursement. Les caracteristiques de ces creances et de ces dettes sont les suivantes :
-Elles s'accompagnent, contrairement a celles des tontines mutuelles, d'un interet. Mais cet interet est un interet negatif puisque c'est le client qui le paye pour que son argent soit en securite. En general, il est de 3%.
-Il n'y a toujours pas d'intermediaire. Le tontinier ne prete pas aux uns ce qu'il a recu des autres, mais il y a un agent avec lequel tous les clients sont en relations, et sur lequel ils ont tous une creance juridiquement identifiee. Cette creance est d'ailleurs materialisee par la carte, emise au nom du tontinier qui l'a remise a chaque client et dont il coche une case a chaque versement. Elle est un titre de creance dont la validite a deja ete reconnue en justice. Si le client la perd, le tontinier peut refuser de le rembourser....mais il a plutot interet a garder la confiance de ses clients.
-La dette du tontinier et la creance de ses clients progressent parallelement jusqu'au remboursement. Ici egalement, l'accumulation est temporaire, mais elle est reguliere car les versements s'echelonnent selon un echeancier prevu d'avance. Ainsi, la determination de la valeur de ces creances et de ces dettes est plus facile car tres souvent, les clients qui viennent d'etre rembourses reprennent aussitot leurs versements.
iii) Les tontines financieres:
Contrairement aux tontines commerciales, ou l'on cherche au maximum a recuperer l'argent depose, les depots effectues ici par l'ensemble des adherents sont mis aux encheres selon des modalites statutairement definies.
Le participant le plus offrant paie donc un interet pour emprunter l'argent de la tontine. Le taux diminue a mesure que les tours se succedent puisque les candidats sont de moins en moins nombreux et que la duree restant a courir est de plus en plus courte. Le produit de ces encheres est ensuite reparti entre les participants qui, quelle que soit leur propre enchere, se trouvent remuneres de leurs propres versements. L'interet est negatif pour ceux qui ont besoin d'emprunter rapidement, et positif pour ceux qui ont pu attendre.
L'interet n'est pas le prix d'equilibre de l'offre et de la demande de liquidite a un moment donne, il resulte de l'etalement pendant le cycle des besoins de chacun.
La part de cotisation varie d'une tontine a une autre en fonction du niveau des revenus des membres et des objectifs qu'ils visent.
On peut signaler que cette forme de tontine est tres presente au Cameroun ou elle est pratiquee par les Bamilekes. Elle s'etend desormais a plusieurs pays voisins comme le Benin, le Centrafrique ou le Burkina Faso. On trouve egalement ce type de tontines en Chine et a Taiwan. Pour plus de details, on se reportera au chapitre
Compte tenu de l'ensemble de ces facteurs, les sommes mobilisees peuvent aller des montants les plus modestes a des montants tres importants. ( par exemple, les tontines des menageres aux conditions modestes recoltent rarement plus de 1000 a 5000 francs CFA, celles des commercants moyens et petits salaries peuvent distribuer a chaque tour plus de 5000 francs a 500000 francs CFA, et dans les tontines des grands commercants, les sommes mises aux encheres peuvent s'elever a 50000000 francs CFA).
(Face aux sommes ainsi mobilisees par le canal des tontines d'une part, et si l'on compare d'autre part les formalites a remplir pour devenir membre d'une tontine a celles qui sont exigees pour acquerir un credit dans une institution financiere moderne, nul ne peut que mieux apprecier le role economique des tontines pour ces gens a faible revenus, rejetes de toutes les instituions financieres).
d) LE STATUT DES TONTINES:
En Afrique, les tontines ne sont pas encore reconnues legalement. Cependant, on peut observer quelques modifications allant dans ce sens. Par exemple, dans la zone de l'Union economique et monetaire ouest-africaine, une loi sur les institutions mutualistes ou cooperatives d'epargne et de credit est en cours d'adoption devant les parlements nationaux. Cette loi vise plutot le secteur semi-formel, mais pourrait servir de tremplin aux tontines pour solliciter leur reconnaissance aupres des autorites.
Remarques sur les differentes formes de tontines:
Les tontines, au-dela d'etre un moyen d'epargner ensemble et de beneficier a tour de role de tout ou partie de cette epargne, peuvent complementairement ou principalement jouer un role social. Elles sont une forme d'entraide, notamment en cas d'hospitalisation ou de deces.
Les interets percus sur les encheres peuvent alimenter cette « section sociale » ou cette derniere peut aussi faire l'objet d'une cotisation particuliere. Certains considerent que le role des tontines est celui d'une « espece de securite sociale a l'africaine ».
Elles en constituent, en tout cas, l'essence meme, l'amorce economique et ethique, l'embryon d'un systeme de prevoyance par repartition, voire meme pour les prestations deces, d'un systeme par capitalisation.
Les associations, et c'est a leur avantage, ne reduisent pas l'individu au simple role d'assiste. Il est un acteur economique et social important au sein de son quartier.
B) LES TONTINES DANS DIFFERENTS PAYS AFRICAINS.
Nous allons etudier ici les differentes variantes d'associations rotatives d'epargne et de credit existantes dans les pays en developpement. On pourra constater l'ampleur du phenomene tontinier, et voir que si a la base, ces tontines sont fondees sur les memes principes, il existe un grand nombre de variantes.
GAMBIE
Ces associations porte ici le nom d'osusu, et elles se multiplient aussi bien dans les zones rurales que dans les zones urbaines. Elles sont pour la plupart organisees par des femmes, et fonctionnent selon un mode classique: versement de sommes fixes a intervalles reguliers qu'un membre retire lors de ces versements.
Ces osusu Gambiens sont tout particulierement importants parmi les femmes travaillant dans les marches des villes et parmi les petits fonctionnaires de Banjul et de province. Ils apparaissent egalement dans les villages agricoles. Une enquete de l'anthropologue Parker Shipton en 1987 a revele que 17% des femmes interrogees appartenaient a une de ces associations contre seulement 1% des hommes.
Dans les villages, les groupes sont constitues presque exclusivement de femmes, et la majorite d'entre eux ne comprenaient que des personnes d'une meme categorie d'age.
La participation de chacun des membres est assuree par la pression des autres membres dont les liens peuvent etre multiples: habitants d'un meme quartier, sexe ou age en commun, relations familiales ou appartenance au meme groupe ethnique. Chaque groupe possede egalement un chef ou organisateur reconnu de tous.
Parker Shipton a par la suite dresser une liste des avantages et inconvenients qui ressortait de son etude (« La corde et la caisse », in D.W. Adams « Finance informelle dans les pays en developpement » pp. 49-50,).
Les avantages sont les suivants:
-l'osusu donne aux epargnants une excuse socialement acceptable pour refuser des prets ou dons a des non-membres.
-L'osusu offre des services financiers a des personnes qui, sinon, risqueraient de ne pas pouvoir beneficier de services bancaires a cause d'un manque de depot initial ou a cause d'autres problemes.
-Generalement, aucune caution n'est exigee.
-L'osusu n'est pas intimidant, comme un organisme financier formel peut parfois l'etre. Il n'y a pas d'obstacle linguistique.
-Il ne necessite ni papiers a remplir ni deplacement, et minimise donc les couts de transaction.
Il donne l'occasion de reunions sociales.
-Etant donne que la transaction a generalement lieu lors de reunion de groupe, les risques de vol et de triche sont reduits.
-Si le groupe le desire, il peut surveiller la facon dont les membres depensent leurs fonds.
-L'osusu peut etre une forme d'assurance.
-Parce qu'il nait de l'initiative de ses membres, l'osusu est generalement ressenti comme une obligation tres forte. Les groupes qui se reunissent pour faire leurs versements peuvent egalement beneficier de l'occasion sociale.
-Lorsque des membres appartiennent a plusieurs ososus, cela permet de faire circuler des montants monetaires importants a travers une population.
-L'epargne dans le cadre d'un osusu n'est sujette ni a un examen minutieux gouvernemental, ni a un controle ni a une imposition fiscale etatique.
Les inconvenients pour leur part sont:
-un osusu qui dure toute l'annee n'est pas ideal pour les communautes qui dependent d'une agriculture seche, parce que les besoins en fonds de beaucoup de membres ont des chances d'arriver au meme moment: c'est le probleme de « covariance saisonniere ». De la meme facon, les osusus sont rarement utiles pour financer des intrants agricoles.
-Meme pendant la saison facile, on ne peut pas toujours obtenir l'argent quand on le veut. La plupart des osusus ont des ordres de rotations flexibles, mais les besoins d'un autre membre peuvent etre juges plus pressants que les votres a un moment donne;
-Le groupe depend fortement de la participation continue de tous ses membres.
-Le groupe ne peut pas facilement s'adapter a des membres qui demenagent, soit qu'ils arrivent dans la communaute, soit qu'ils en partent.
-Les depots et emprunt effectues dans le cadre d'un osusu ne sont pas secrets au niveau local.
Peux d'informations sont disponibles sur la taille de ces associations rotatives d'epargne et de credit. Il n'existe pas de taille « ideale », celle-ci variant selon la tache et le caractere de ses membres ou des chefs de groupe, mais egalement selon le sexe, l'ethnie ou encore l'age. Selon l'auteur de l'enquete, l'osusu a des caracteristiques qu'il faudrait incorporer lors de la conception de systemes institutionnels formels de credit.
D'autres caracteristiques concernant ces osusu de Gambie paraissent interessantes a etudier:
-il semble que les associations rurales ne comprenant que des membres du meme sexe reussissent mieux que lorsqu'elles sont mixtes. Cela pourrait venir du fait que parce qu'ils sont du meme sexe et du meme age, les membres d'un meme osusu rural auront vraisemblablement des niveaux de solvabilite ou de capacites financieres similaires.
-Les groupes qui ont le plus de chances de reussir a mobiliser ou a gerer des finances au niveau local sont les groupes qui existent deja dans d'autres buts (travail agricole, activites pour jeunes, sports).
-Un autre avantage subtil de l'osusu et des autres clubs de contributions est que leurs membres ne peuvent pas facilement se surrendetter, puisque les montants des prets sont reglementes par les montants que les agriculteurs de condition similaire peuvent deposer. Les montants sont automatiquement ajustes a des niveaux remboursables.
-Enfin, comme nous l'avons deja vu, ces systemes d'epargne et de credit de groupe ont tendance a mieux fonctionner que les systemes individuels, pour les paysans pauvres et surtout pour les femmes.
CAMEROUN
Les associations rotatives d'epargne et de credit au Cameroun ont ete documentees pour la premiere fois par Meyer. On les appelle djanggis dans les provinces anglophones, et bien sur tontines dans les provinces francophones. Elles ont fait l'objet de nombreuses etudes par la suite. Nous nous referons ici a la typologie de Bruno BEKOLO-EBE (1991) afin de donner un apercu des differentes formes que peuvent prendre les tontines camerounaises et du comportement d'epargne des agents economiques a l'interieur de celles-ci.
Si le comportement a l'interieur des tontines est d'abord determine par la tradition sociale, la recherche de gain et de rendement financier guide de plus en plus ce comportement.
Selon BEKOLO-EBE, cinq types de tontines sont representatifs du systeme tontinier de ce pays:
-La tontine simple: Il y a un nombre fixe de participants, ceux-ci versant une somme, elle aussi fixee par avance, regulierement, et suivant un ordre predetermine, chacun recevra le produit des versements de l'ensemble des participants.
Dans ce type de tontine, le comportement des participants peut etre defini comme un comportement de faible risque. Ils trouvent en fait un avantage dans la contrainte d'epargne qu'implique la tontine.
Donc, la tontine de ce point de vue apparait comme un systeme d'incitation a l'epargne. Seule la position de chacun dans le cycle de la tontine introduit une difference quant au cout supporte (le delai d'attente entraine souvent une depreciation monetaire du fait de l'inflation). Cependant, la place dans le cycle resulte elle aussi souvent d'un consensus entre participants, et fait jouer des regles plus ou moins formelles. Par exemple, se sont la plupart du temps les nouveaux membres qui sont places en fin de cycle, et les plus anciens en debut de cycle.
Les membres qui appartiennent a ces tontines sont en general des individus qui ne sont pas attires par le gain financier, mais des individus pour qui la tontine a avant tout un role social.
-La tontine simple avec caisse de prets: Chaque participant, en plus de sa cotisation fixe verse une seconde somme d'argent qui depend de ses possibilites, et cette somme vient s'ajouter a celles des autres membres pour constituer la caisse des prets. Les participants comme les non-participants peuvent se voir accorde un pret dont le remboursement produira des interets qui seront redistribues en fin de cycle a chacun des membres uniquement, et cela au prorata de ce qu'ils y auront verse au cours du cycle. Etant donnee l'existence de cette caisse de prets, on peut dire que les individus qui adherent a ces tontines sont attires par le gain financier puisqu'ils cherchent en effet a realiser une plus-value. Cependant, ils doivent accepter une double contrainte d'epargne. La premiere etant qu'ils doivent participer normalement a la tontine et donc verser periodiquement une somme fixe. La deuxieme contrainte est cette contribution a la caisse de prets qui peut etre variable, mais tout de meme obligatoire. C'est un systeme assez repandu au Cameroun chez les femmes, celles-ci jouant un role important de preteur sur le marche de l'argent a court terme. Ces contraintes existent aussi dans le troisieme type de tontines.
-La tontine avec caisse de prets et de secours: Dans cette tontine, tres proche du deuxieme type, les membres pratiquent un troisieme versement periodique qui alimente une caisse de secours destinee a aider les divers participants en cas d'evenement heureux ou malheureux, par exemple un mariage, une naissance, un deces, un incendie,...
-la tontine avec encheres non capitalisees: Ce systeme tend a etre de plus en plus repandu, et ses regles integrent la notion de cout de capital et de risque. Contrairement aux systemes precedents, les sommes collectees en une periode, celles-ci constituant le gros lot, sont vendues aux encheres et remises au plus offrant. Seuls les participants n'ayant pas encore beneficie du gros lot sont autorises a participer aux encheres. Le comportement qui caracterise les membres de ces tontines est un comportement dit de « speculateurs calculateurs ». Ils speculent en effet sur le montant des encheres qu'ils font, et qu'ils esperent peu eleve, et ils speculent egalement sur le montant des encheres des autres acquereurs, qu'ils souhaitent le plus eleve possible pour augmenter le nombre de tours gratuits. Ces tontines sont composees essentiellement de commercants, des speculateurs immobiliers, d'investisseurs ou de petits et moyens entrepreneurs.
-La tontine avec encheres capitalisees: La difference avec le type precedent est que la rime d'enchere payee par celui auquel on attribut le gros lot est divise en petits lots qui seront revendus egalement aux encheres sur du court terme. Gros lot et petits lots constituent respectivement le « marche principal » et le « marche secondaire ». Les marches se terminent une fois que l'ensemble des montants apportes a ete redistribue. Des personnes exterieures a la tontine peuvent avoir acces au marche secondaire par l'intermediaire d'amis membres. Parfois, les sommes cumulees sur le marche secondaire seront suffisantes pour proposer un deuxieme gros lot, et dans ce cas, le cycle de la tontine sera reduit d'une periode.
SOMALIE
Les agriculteurs somaliens ont parfois recours a des associations rotatives d'epargne et de credit, appelees la-bas shaloogo. Mais c'est dans les zones urbaines de Somalie que l'on trouve le plus frequemment ces associations, surtout chez les vendeurs de marches et meme les fonctionnaires.
Mais, lorsqu'ils ont besoin de credit, ces agriculteurs s'adressent le plus souvent a des commercants ou preteurs professionnels pour obtenir un pret.
NIGER
le Niger est un pays sahelien a faible densite de population et sujet a la secheresse. L'agriculture de subsistance y domine, suivie de l'elevage. Des troupeaux de gros betail migrateurs se deplacent et traversent les frontieres des pays voisins. Risque et incertitude sont courants dans les campagnes de ce pays, et, hors des grandes villes, la finance informelle est presque toujours l'unique source financiere.
Dans ce pays, les tontines villageoises sont tres variees. Elles vont de groupes de menageres et d'agriculteurs, a des groupes de vendeurs de marche, de chefs de petites entreprises, d'instituteurs et d'agents de vulgarisation, entre autres.
A la base de ces associations se trouve l'occupation professionnelle, bien que de temps en temps, certains groupes soient des melanges de differents genres. Ces liens professionnels sont evidemment en correlation etroite avec des niveaux de revenus similaires. La proximite geographique est aussi une caracteristique importante de ces tontines.
Une etude realisee par l'Ohio State University sur 56 tontines somaliennes rapportait que le nombre de membres variait de quatre a quarante individus, et que la frequence des reunions, des versements et des prets allait de cinq jours a un mois. Le cycle complet de ces tontines oscillait entre un mois et un an. L'ordre de reception d'un pret etait quant a lui flexible, pouvant s'adapter ainsi aux besoins de ses membres. Les tontines a revenus eleves avaient un tresorier informel qui souvent etait remunere ou privilegie dans l'ordre de reception des prets. Certains membres appartenaient a plusieurs tontines a la fois.
Les resultats de cette etude montraient egalement le large volume de fonds se deplacant a travers ces groupes, bien qu'il existait des differences notables entre les montants des nombreuses tontines.
RWANDA
Quelques associations sociales similaires aux tontines existent depuis longtemps dans la societe rwandaise, mais la tontine typique est relativement recente.
Aujourd'hui, le mouvement tontinier occupe au moins quatre creneaux d'activite: tontines d'entraide en argent, tontines d'entraide rotative en travail agricole, tontines d'entraide rotative en travaille de construction-logement et mutuelles de prevoyance multirisque. On notera que les tontines des trois premiers creneaux sont basees sur un principe de reciprocite tres precis qui justifie leur bon fonctionnement et la pleine satisfaction de ses membres.
En 1988, un recensement effectue au Rwanda sur les tontines en denombrait plus de 9200. Le descriptif des differentes formes de tontines est base sur ce recensement de 1988.
i) les associations d'echange rotatif d'argent: celles-ci sont le type de tontines le plus repandu au Rwanda, soit environ 55% de l'ensemble du mouvement tontinier.
Ce systeme d'epargne est au depart concu pour resoudre a tour de role divers problemes personnels des membres qui forment la tontine. Les revenus monetaires d'un certain nombre d'individus sont collectes regulierement et attribuer a l'un d'eux pour qu'il utilise ces fonds a son profit personnel. Comme la majeure partie des tontines de ce type, la confiance en est un des principes de base, celle-ci s'obtenant surtout en ouvrant la tontine aux individus bien connus de tous les membres.
Les sommes epargnees ne produisent ici aucun interet financier pour l'epargnant. Leur fonctionnement s'articule autour d'un comite de direction compose d'un president, d'un vice-president, d'un secretaire, d'un tresorier, parfois meme d'un « policier » charge de la discipline et du maintien de l'ordre lors des reunions. Ce comite de direction procede a la collecte et a la remise des fonds.
En dehors du cahier des tours de versements, les tontines sont generalement depourvues de reglement ecrit, ce qui n'empeche pas que la regularite des versements des montants convenus est rigoureusement surveillee par tous.
Les retards des versements sont sanctionnes d'une amande, en general de 10 a 30%, ceci permettant d'alimenter une caisse commune pour financer l'ambiance festive des reunions. On voit donc que cette tontine correspond a une association rotative d'epargne et de credit mutuelle classique, comme nous les avons decrites dans le chapitre precedent.
ii) Les associations d'echange rotatif de travail: c'est quantitativement le deuxieme modele de tontines qui existe au Rwanda, soit pres de 32% de l'ensemble des tontines.
Les tontines de travail fonctionnent suivant le meme schema rotatif de distribution de l'epargne, exigent la meme cohesion et la meme confiance entre les membres que les tontines d'argent. Le comite de direction par contre n'existe pas ici, la confiance entre les membres suffisant au bon fonctionnement de ces tontines.
Ainsi, chaque membre beneficie, a tour de role, du travail des autres, ce qui evidemment presente de forts interets, notamment en matiere de construction puisque le beneficiaire dispose alors d'un logement en un temps record.
Ces prestations de groupe sont des occasions saines d'echange d'idees et de critique d'actualite tous azimuts.
iii) Les associations d'entraide de profil mutualiste: troisieme type de tontines rwandaises, elles representent moins de 3% de l'ensemble des tontines de ce pays.
Le principe de base d'une association de type mutualiste est le suivant: les membres d'une telle association se promettent certaines prestations et/ou par le paiement d'une cotisation, alimentent regulierement un fonds pour couvrir systematiquement, en tout ou en partie, les frais lies a certains evenements (accident corporel, maladie, incendie, deces-funerailles,...) dont l'occurrence est imprevisible. Ce caractere aleatoire de la date de survenance de l'evenement est l'element fondamental d'une vraie mutualite.
On pourra noter cependant que les risques assures par ces tontines sont habituellement couverts par le reseau de solidarite coutumiere fonde sur la consanguinite, les echanges matrimoniaux ou le voisinage. On peut donc dire que la contribution reelle du mouvement mutualiste est tres limitee.
iv) Les associations d'entraide de profil cooperatif: dernier type connu de tontines au Rwanda, elles representent 1.5% environ de l'ensemble du mouvement tontinier rwandais. On peut qualifier ces associations comme un etat intermediaire transitoire entre les tontines et les cooperatives. Elles concernent essentiellement des series d'activites de production de biens en commun par les membres.
On suppose que les tontines rwandaises sont le resultat d'un processus de mutation des structures preexistantes vers des structures d'entraide resolument au-dessus du lien parental et cela sous l'effet d'un usage de plus en plus radical de la monnaie dans la societe traditionnelle.
Il semble egalement que les migrations alternantes de l'epoque coloniale entre le Rwanda et les territoires britanniques d'Afrique orientale soient en cause. En effet, les premieres organisations tontinieres ont pris naissance dans la peripherie orientale du pays: ibimina (associations d'echange rotatif d'argent) en prefecture de Byumba et muvandimwe (associations composites d'echange rotatif d'argent, de mutualite et d'epargne-credit) en prefecture de Kibungo.
Selon toute vraisemblance, ce mouvement a donc ete introduit de l'etranger par le biais de quelques migrants revenus au Rwanda par la suite et qui ont implante le systeme dans leur pays vars les annees 1940.
Depuis l'epoque ou le phenomene tontinier a fait son apparition au Rwanda, il n'a cesse de se repandre sur tout le territoire. Comme nous l'avons vu precedemment, on compte aujourd'hui pres de 10000 de ces associations, celles-ci regroupant en leur sein environ 200.000 membres. C'est surtout depuis une vingtaine d'annees que le phenomene s'est fortement accelere, puisque le pays ne comptait qu'une centaine de tontines en 1977. On peut donc en conclure que le mouvement tontinier est d'emergence tres recente au Rwanda (Le taux annuel de croissance de ce mouvement est de 24.77%).
L'etude realisee par Jean NZISABIRA (AUPELF-UREF, note de recherche n°91.15) sur les tontines rwandaise nous renseigne sur leur structure socio-demographique:
-Les tontines sont, en tres large majorite, de tres petite taille sociale (en moyenne 19 membres).
-Elles sont composees d'une tres large majorite d'hommes adultes, de peu de femmes et de peu de jeunes de moins de 18 ans.
-Enfin, elles sont en general l'affaire de paysans peu fortunes.
En 1987, on estime a un milliard de francs le montant des transactions ayant eu lieu a l'interieur des tontines rwandaises.
BURKINA FASO
Dans ce pays egalement la tontine est une pratique courante, et plus particulierement en milieu urbain ou le taux de monetarisation est relativement important.
Les informations dont nous nous servirons ici viennent d'une etude realisee en 1990 et portant sur environ 70 tontines.
Voici les caracteristiques des tontines du Burkina Faso:
-Les motifs de constitution d'une tontine sont par ordre decroissant d'importance: pouvoir epargner, securite au niveau social ou motif purement financier.
-Les tontines traditionnelles avaient base leurs liens sur des considerations ethniques, claniques, tribales ou de parente etroite. Mais dans le contexte evolutif actuel de la societe, ces liens se sont beaucoup effrites surtout en milieu urbain, au profit d'autres formes de polarisation des relations. Desormais, la plupart des tontines se constituent autour du lien du travail, d'une meme activite ou d'un quartier.
-Au Burkina Faso, 51% des tontines sont exclusivement reservees aux hommes contre 36% pour les femmes. Et 13% sont mixtes.
-Il n'y a pas de droit d'entree a payer pour participer a une tontine, mais il faut etre presente par un ancien membre ou le president a titre de caution morale.
-65% de ces tontines ont moins de 20 membres, 26% en ont entre 20 et 50, et seulement 9% detenaient des effectifs compris entre 51 et 150 membres.
-Concernant la periode de rotation, 43% des tontines ont une rotation d'une duree egale a un mois, suivent celles d'une duree comprise entre 2 et 7 jours (35%), 6% ont une rotation superieure a un mois, et 3% dure entre 8 et 15 jours. La periode d'une journee est egalement bien representee avec 13% des tontines concernees.
-Dans les tontines observees, les cotisations de 1000 a 5000 F sont dominantes (42%). Les petites cotisations de niveau inferieur a 500 F occupent 32% des cas. Les cotisations de l'ordre de 5000 F et plus representent 17%. La tranche de 500 a 1000 F est sous representee avec seulement 9% des cas.
-La tranche modale des fonds recoltes a chaque tour est comprise entre 10000 et 20000 F (26%). Les tranches de 20000 a 30000 F ; 30000 a 50000 F representent respectivement 20 et 19%. Les niveaux de 50000 a 100000 F, et de plus de 100000F occupent chacun 10%.
-Dans 49% des cas, l'attribution des tours pour recevoir les fonds recoltes se fait selon la respectabilite du membre, son honnetete, le degre de confiance manifeste par le groupe a son egard, sa solvabilite. Le president joue un role fondamental dans cette attribution des tours. Dans 35% des autres cas, le beneficiaire est tire a chaque tour, et dans 10% des cas, le systeme des encheres le determine.
La tontine est donc un phenomene de masse au Burkina Faso, et surtout, comme nous l'avons dit, en milieu urbain qui se situe a un stade avance portant sur les tontines monetaires. Autrefois basee sur le travail, elle repose aujourd'hui davantage sur la monnaie depuis l'introduction des rapports marchands et de la monnaie dans l'economie. Et comme dans de nombreux autres pays, la proliferation des tontines provient egalement de la difficulte d'acces au credit bancaire.
BENIN
Le Benin est egalement un pays ou le phenomene tontinier s'est fortement developpe ces dernieres annees. Quelques enquetes menees par des etudiants autochtones sans grands moyens permettent deja de degager quelques grandes caracteristiques:
-l'etude realisee par l'un d'entre eux a montre que dans ce pays, pratiquement tous les hommes et toutes les femmes de plus de dix-huit ans participent a une tontine.
-Une autre enquete effectuee au sein d'un ministere revele que 98% des personnes interrogees sont membres d'une tontine.
-Le ministere du developpement a lui-meme effectue une enquete dans un certain nombre de communes reparties dans plusieurs provinces. Celle-ci a montre que moins de quatre pour-cent des personnes interrogees pensaient que les tontines constituaient un obstacle a la mobilisation de l'epargne rurale.
D'autres travaux menes par l'Universite des Reseaux d'Expression francaise dans le cadre d'une etude sur les circuits paralleles de financement ont confirme que la tontine etait une pratique tres repandue au Benin, et peut etre plus encore que dans les pays voisins. Le developpement de la pratique tontiniere comme de l'ensemble du secteur informel semble provenir d'une reaction aux programmes d'ajustement elabores par le Fonds monetaire et la Banque mondiale.
Comme dans de nombreux autres pays, les deux formes de tontines les plus repandues au Benin sont les tontines mutuelles et commerciales. On pourra se reporter aux exemples precedents pour plus de details sur le fonctionnement de ces deux formes traditionnelles de tontines.
Les tontines beninoises sont egalement, comme beaucoup d'autres, caracterisees par une grande souplesse ce qui leur permet une adaptation constante. Et au Benin comme ailleurs, la tontine pourrait servir de point de depart pour un rapprochement avec la finance institutionnelle.
REMARQUES: Nous l'avons vu, les tontines sont presentes dans la majeure partie des pays africains. On les trouve egalement au Togo sous les formes que nous connaissons deja, tontines mutuelles, commerciales ou financieres, mais egalement au Congo, au Nigeria ou autres, presentant a chaque fois des caracteristiques qui leur sont propres. Il peut arriver que les communautes qui s'expatrient reconstituent leurs tontines dans d'autres pays, c'est le cas par exemple d'un groupe de camerounais en republique Centrafricaine.
Extrait de l'étude de M. Gasse-Hiello
Gabon : Le Boom du secteur informel exaspère les pouvoirs publics
par Antoine Lawson
Le commerce informel a pris un envol considérable au Gabon, depuis ces dernières années caractérisées par des difficultés socio-économiques notoires. Mais les pouvoirs publics essaient par tous les moyens de freiner cet essor.
Selon une estimation du ministère des Finances et de l'Economie, le secteur informel, qui échappe au contrôle de l'Etat, brasse environ 9 milliards de Francs CFA par an.
Les économistes attribuent le boom des activités informelles à la crise économique que connaît le Gabon, un pays de l'Afrique centrale, depuis quelques années.
La crise asiatique, la baisse du cours du dollar et la récente chute des produits pétroliers dont le pays tire la majeure partie de ses revenus ont frappé de plein fouet l'économie gabonaise jadis prospère.
Les difficultés économiques du Gabon s'etaient amplifiées après la dévaluation du Franc CFA en 1994.
Le Franc CFA, la monnaie commune à 15 Etats d'Afrique de l'Ouest et du Centre, avait alors perdu la moitié de sa valeur par rapport au Franc français, sa devise de référence.
''La crise met en péril une large part du tissu économique dont la conséquence est la baisse des recettes de l'Etat '', commente Christian Mondjo, du ministère du Commerce.
La mise en application en avril 1995 de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) a provoqué une flambée des prix et une dégradation du pouvoir d'achat des habitants.
Les entreprises qui ont vu leurs charges salariales croître ont cru trouver la solution dans des compressions de personnel ou des réductions des salaires pour éviter l'asphyxie des taxes de l'Etat.
''Le secteur informel jadis presque inexistant est réellement apparu avec l'inflation galopante qui a débuté en 1986'', explique Michel Nzamba, contrôleur des Impôts.
Selon Nzamba, au cours de la période 1993-1995, les prix avaient augmenté de 32,4 à 35,6% et dans une proportion moindre entre 1995 et 1996.
Le commerce informel qui constituait essentiellement le domaine d'intervention des Ouest-Africains et des voisins camerounais, a attiré depuis peu les Gabonais.
Avec la vie chère et la flambée des prix, certains Gabonais découragés d'attendre indéfiniment un emploi à la Fonction publique, premier employeur du pays, se sont découverts des vocations d'investisseurs et tout est devenu prétexte à faire du commerce.
Aujourd'hui, on peut presque tout acheter dans la rue, sur les parkings, à la sortie des supermarchés : des légumes aux vêtements divers en passant par des postes de radio, le téléphone portable ou la cravate et des meubles en rotin.
Devenus très nombreux, les commerçants des rues concurrencent dangereusement les magasins légalement installés.
Les marchands ambulants qui exercent au Gabon sont en majorité des fillettes et des femmes qui vendent généralement des produits consommables devant les chantiers où a proximité des établissements scolaires où elles s'installent dès 7 heures du matin.
Mais le gros du secteur informel englobe les importations des produits en provenance principalement d'Asie, des Etats-Unis et ils arrivent sur le marché gabonais à travers des circuits non traditionnels.
''Le secteur informel représente environ 50% de la valeur des importations gabonaises. Les acheteurs et revendeurs, organisés en circuits, déclarent généralement des chiffres fantaisistes pour échapper à la fiscalité'', a affirmé un agent du ministère du Commerce et de l'Industrie.
L'essor du secteur formel n'est pas apprécié par les autorités locales qui essaient par divers moyens d'y mettre un terme.
''Le commerce informel et les prestations de services sont assurés par des particuliers très actifs ou par des sociétés non autorisées à les fournir'', rapporte un contrôleur de prix.
''Ces activités économiques ont toujours existé au Gabon à faible échelle, mais n'avaient pas troublé l'équilibre des circuits de commercialisation ou de distribution, comme c'est le cas aujourd'hui'', ajoute-t-il.
Selon un autre contrôleur de la Mairie, ''Le commerce informel représente un manque à gagner fiscal important pour l'Etat et malgré la chasse aux commerçants de la rue par la police, l'activité informelle s'est bien installée et fait partie du quotidien''.
La chasse aux commerçants de rue est l'une des méthodes utilisées par les pouvoirs publics pour décourager l'informel.
Les autorités avancent également que le développement de l'informel entrave les efforts fournis par l'Etat pour réorganiser le paysage entreprenarial.
Mais les promoteurs de l'informel s'en défendent. Selon eux, les entrepreneurs qui sont partis de l'informel et qui ont réussi commencent peu a peu à régulariser leurs activités même s'ils ont du mal à s'adapter aux règles fiscales du pays.
''Le secteur informel qui est non structuré a servi à quelques opérateurs qui n'ont pu obtenir des crédits auprès des banques, de monter des affaires à structure et à gestion moderne'', explique Hamady SY, le propriétaire d'un magasin de chaussures importées directement d'Italie.
Jean-Pierre Tchoua, président de la Confédération nationale du Patronat gabonais, affirme que l'Etat gabonais avait pu obtenir un prêt de 40 milliards de F CFA auprès de la Banque africaine de développement (BAD) pour encourager la création des petites entreprises et évaluer de nouveaux mécanismes de crédits.
Cependant, les conditions d'octroi des crédits avaient été jugées draconiennes par les promoteurs gabonais, ajoute Tchoua sans préciser ces conditions.
Une autre solution préconisée pour freiner l'informel est l'amélioration des conditions de vie des populations, notamment des salariés qui jouent un rôle non négligeable dans l'informel.
Les négociations entre les syndicats et le gouvernement engagées depuis le mois de février pour l'amélioration des conditions de vie des populations sont dans l'impasse.
''Malgré l'impasse actuelle, les négociations devraient aboutir'', avait déclaré Christiane Bitougat, la secrétaire générale de l'Union des syndicats de l'administration publique (USAP).
L'explosion du commerce informel a contraint certains établissements de fermer à cause d'une concurrence déloyale liée notamment à l'importation des denrées alimentaires très peu produites sur place.
Les populations gabonaises se réjouissent de l'essor de l'informel.
''Pour nous consommateur moins aisé, le commerce informel est arrivé à point nommé car en attendant que les promesses du gouvernement d'augmenter les salaires ou les allocations familiales se concrétisent, la vie au quotidien est moins pénible", estime un instituteur d'école.

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